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Le président de l’ADC-Ikibiri, une coalition de l’opposition extra-parlementaire, a été entendu par le parquet de Bujumbura, ce lundi. Il est visé par une plainte du CNDD-FDD, le parti au pouvoir, et la radio Rema FM après un courrier adressé à Ban Ki-moon l’alertant sur une « catastrophe humanitaire qui pourrait se jouer bientôt » au Burundi.

Léonce Ngendakumana, le président de l’Alliance démocratique pour le changement (ADC-Ikibiri), avait adressé le 6 février un courrier au secrétaire général de l’ONU pour attirer son attention sur « la catastrophe humanitaire qui pourrait se jouer bientôt » dans ce pays, écrivait-il alors. Un véritable pamphlet contre le pouvoir du parti CNDD-FDD et contre la radio Rema FM, qu’il accusait de jouer le rôle de la Radio Mille collines (RTLM) en 1994 au Rwanda. Le CNDD-FDD avait porté plainte dans la foulée, mais la justice n’avait pas donné suite, jusqu’ici. Les événements se sont accélérés depuis une semaine, suite aux mises en garde répétées des Nations unies et, surtout, après la divulgation de la note interne à l’ONU qui accuse le pouvoir burundais de distribuer des armes à ses jeunes militants, les Imbonerakure. Depuis, le président de l’ADC-Ikibiri est dans le viseur de la justice burundaise.

Six heures dans le bureau du procureur

Léonce Ngendakumana avait déjà été entendu jeudi. Il a passé cette fois six heures dans le bureau du substitut du procureur de Bujumbura chargé d’instruire cette affaire. Six longues heures, pendant lesquelles il a été confronté à ses accusateurs du parti CNDD-FDD et de la radio Rema FM, proche du parti au pouvoir. A sa sortie du parquet, Léonce Ngendakumana a été accueilli triomphalement par la centaine de militants venus le soutenir. Puis, son avocat, Me François Nyamoya a dit son étonnement de le voir comparaître devant le parquet. « Cela montre les limites de la compréhension de ce que serait une démocratie. On ne peut pas porter plainte devant le parquet pour une lettre écrite officiellement au secrétaire général des Nations unies. Ça, c’est se ridiculiser », estime ce ténor du barreau de Bujumbura, qui juge que contester ces accusations par la même voie aurait suffi.

Le CNDD demande « des preuves »

Un point de vue que ne partage pas le porte-parole du parti au pouvoir, pour qui les accusations de génocide sont très graves. Le CNDD-FDD se devait de porter plainte, assure Onésime Nduwiman. « C’est une question de procédure. Il a été demandé au ministère public de statuer sur l’affaire. Mais il est de plein droit, pour l’avocat, de demander que l’affaire soit portée directement devant le juge. D’une façon ou d’une autre, monsieur Léonce Ngendakumana sera obligé de donner ses preuves », insiste Onésime Nduwiman. Le parquet de Bujumbura a donné au leader de l’opposition extra-parlementaire jusqu’à vendredi 25 avril pour qu’il lui apporte toutes les preuves de ses allégations.