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Les pressions internationales se multiplient sur le président Nkurunziza à l’approche du congrès de son parti, le CNDD-FDD. Le secrétaire général de l’ONU, la présidente de la Commission de l’Union africaine ont appelé le chef de l’État à respecter les accords d’Arusha, accords qui prévoient deux mandats uniquement pour le chef de l’État. Pour les partisans du président, il y aurait ambiguïté, puisque la constitution burundaise – elle – parle d’une élection du président à la magistrature suprême et que Pierre Nkurunziza a été élu au suffrage indirect pour son premier mandat et pourrait donc se représenter. Les églises, l’opposition et la société civile se sont elles prononcés contre ce troisième mandat, rejointes ces derniers jours par plusieurs dizaines de frondeurs du parti au pouvoir. Willy Nyamitwe, conseiller du président Nkurunziza, et président de la commission Communication pour la campagne électorale du CNDD-FDD, est l’invité de RFI.

RFI : Les détracteurs du président Nkurunziza, donc les frondeurs du CNDD-FDD, l’opposition, mais aussi la société civile et les Eglises estiment qu’une nouvelle candidature du chef de l’Etat menacerait la paix au Burundi. Que leur répondez-vous ?

Willy Nyamitwe : D’abord je pense que c’est une mauvaise appréciation, mais c’est la leur et c’est leur droit de penser différemment. Mais est-ce que le reste de la population pense de la même façon ? La réponse est non. Le reste de la population pense plutôt que si le président ne se représentait pas, c’est ça qui pourrait créer des troubles.

Il n’y a pas que des Burundais qui s’inquiètent, on a vu de hauts responsables internationaux se pencher sur cette question. Le dernier en date c’est Ban Ki-moon, le secrétaire général des Nations unies a appelé le président Nkurunziza pour lui demander de réfléchir à une nouvelle candidature et au risque que cela pourrait faire courir au pays. Comment le président a réagi à ce coup de fil ?

C’est inquiétant quand des gens au pays promettent des troubles, promettent de tout démolir si le président de la République se représentait. C’est inquiétant donc sur le plan sécuritaire si il y a des gens qui, au lieu de préparer les élections, préparent la guerre, préparent des troubles, préparent la transition. Alors si la communauté internationale s’inquiète, elle a raison, alors que répond le président ? Il les tranquillise, il dit que les élections se dérouleront dans un esprit calme, seront transparentes et démocratiques.

Ces dernières semaines, on a vu le Conseil de sécurité de l’ONU venir et s’inquiéter de cette éventuelle candidature, on a vu la présidente de la commission de l’Union africaine insister sur les accords d’Arusha, on a vu le président tanzanien Kikwete s’inquiéter de cette situation. Est-ce qu’à un moment, tous ces pays et toutes ces organisations peuvent avoir tord de s’inquiéter d’une nouvelle candidature ?

Ces organisations répondent plutôt à l’appel que leur a lancé le chef de l’Etat burundais. Depuis l’année passée, il a toujours demandé à la communauté internationale, à l’Union européenne, aux Nations unies, à l’Union africaine de venir appuyer le Burundi durant ces moments de préparatifs des élections. C’est tout simplement pour répondre à cet appel que leur a lancé le chef de l’Etat. C’est un point positif, nous accueillons ça favorablement.

Mais là, vous semblez éluder le fait qu’ils insistent à peu près tous sur le respect des accords d’Arusha ?

La communauté internationale a toujours demandé à tous les gouvernements de respecter leur Constitution, ce n’est pas pour le cas du Burundi que le discours changerait. Alors c’est le CNDD-FDD, le gouvernement qui a mis en application l’accord d’Arusha, et les élections de 2015 seront organisées conformément à la Constitution, l’accord d’Arusha, à la loi sur les partis politiques, à la loi qui régit les manifestations publiques et à d’autres lois qui régissent la République du Burundi.

Les accords d’Arusha sont clairs, c’est deux mandats et c’est terminé. Ca voudrait dire qu’il n’y a pas de nouvelle candidature du président Nkurunziza si c’était aussi par rapport aux accords d’Arusha que le président déterminait la suite des évènements ?

Ils figurent parmi le bloc constitutionnel ainsi que d’autres traités que le Burundi a ratifié, etc. Alors les instruments qui ont mené vers la Constitution ne peuvent jamais être supérieurs à la Constitution elle-même. En cas de conflit d’intérêt sur l’interprétation de la constitution, la Cour constitutionnelle est là pour pouvoir trancher et nous pensons que si il y a conflit, la Cour constitutionnelle pourra trancher dans ce sens.

Pourquoi exclure certains membres du CNDD-FDD qui se sont exprimés contre un troisième mandat pour le président Nkurunziza et pourquoi ne pas considérer qu’il s’agit là d’un courant au sein du parti et que ce courant peut s’exprimer par exemple à travers le congrès ?

Vous êtes vous jamais posé la question de savoir pourquoi ces gens sortent du silence seulement à deux mois des élections lors de la confection des listes électorales ? Parce que ces signataires dont vous parlez, ces frondeurs dont vous parlez, que nous, nous considérons comme insubordonnés, c’est des gens qui n’ont pas été ajoutés sur des listes électorales. Alors la frustration a amené ces gens à devenir des insubordonnés et c’est maintenant que ces gens sortent pour emboiter le pas à ceux qui ne veulent pas du tout les élections. Alors ces gens se disent, et bien, autant que tout s’effondre puisque nous ne figurons pas sur ces listes. Mais, allez les interroger, c’est des gens qui défendaient becs et ongles ce mandat présidentiel, c’est des gens qui, au sein du parti, se disaient être des experts de l’accord d’Arusha et disaient que l’accord d’Arusha ne peut pas surpasser la Constitution.

Ca veut dire qu’il n’y a pas de débat aujourd’hui au sein du CNDD-FDD sur une éventuelle candidature du président Nkurunziza ?

Le débat démocratique au sein du CNDD-FDD a toujours existé, nous tenons des réunions au niveau national, au niveau provincial, au niveau communal. Je ne peux pas comprendre comment, aujourd’hui, des gens qui sont impliqués dans ce débat contradictoire au sein du parti, peuvent sortir une pétition alors qu’ils n’ont jamais manqué d’espace pour s’exprimer au sein du parti.