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Mot introductif du Chargé de la Communication à la Présidence de la République du Burundi lors d’une Conférence de Presse à
Bruxelles, le 18 juillet 2015.

Excellence Monsieur l’Ambassadeur
Chers Consoeurs & Confrères, les chevaliers de la plume
Mesdames, Messieurs, tout protocole observé,

1. Je vous remercie d’avoir répondu à cette invitation, un weekend. J’espère être bref et pouvoir répondre, en toute franchise, à vos interrogations, particulièrement sur la situation qui prévaut au Burundi. Ici, à Bruxelles, j’ai rencontré diverses personnalités politiques au Ministère des Affaires Etrangères et à l’Union Européenne. Je me suis entretenu avec quelques compatriotes. Je suis persuadé que la situation socio-politique du Burundi, vue d’ici, est peinte en noir. Un pays décoloré, aux couleurs ternes. Un pays qui s’engouffre dans l’abîme de l’inconnu. Un pays où rien ne va. Un de mes compatriotes m’a d’ailleurs demandé s’il y avait encore âme qui bouge car croitil, « le pays s’est complètement vidé de ses habitants ».

2. QUE SE PASSE-T-IL AU BURUNDI ? Nul n’ignore que nous sommes dans un processus électoral. Mais au delà de la fièvre électorale que pareille période engendre, sont venus s’y greffer un débat houleux et même violent sur l’éligibilité ou pas du Président Pierre Nkurunziza à la présidentielle de 2015. Houleux ? Quoi de plus normal. En démocratie de tels niveaux de débats peuvent être atteints, quand l’opposition ne ménage point le pouvoir ou viceversa. Cependant, que l’activisme des courants intellectuels et du débat contradictoire laisse la place au jet de grenades, à l’utilisation d’armes automatiques, au vandalisme, à la destruction, aux assassinats ciblés et que sais-je encore, c’est que nous empruntons une voie dangereuse, celle de la fermeture des portes de la démocratie.

3. Au Burundi, donc, le Gouvernement a organisé, dans les délais, toute la série d’élections prévues en vue de remplacer les institutions élues en 2010 par d’autres par la voie démocratique. Ce cycle d’élections allait commencer fin mai avec les communales et législatives. L’opposition radicale a préféré se retirer de la course électorale, exactement comme elle a fait en 2010. Un retrait bien évidemment habillé d’un prétexte : troisième mandat du Président Pierre Nkurunziza. Je n’en disconviens pas, chacun peut avoir sa manière d’interpréter les prescrits constitutionnels. Le Constituant a d’ailleurs prévu,
en cas de conflit d’interprétation de la Constitution, d’autres voies de recours. Est-ce que toutes ces voies ont-elles été épuisées par l’opposition burundaise avant qu’elle ne choisisse la voie de la violence ?

4. Chaque fois, l’opposition burundaise évoque des fraudes massives qu’elle n’a jamais été en mesure de prouver. Le Gouvernement du Burundi a toujours fait montre de transparence dans la conduction du processus électoral. Le Président Nkurunziza a formellement demandé aux partenaires du Burundi et à la Communauté Internationale d’envoyer des observateurs longtemps avant le début des consultations électorales. Ceci pour suivre de près la mise en application de la feuille de route telle que convenue entre acteurs politiques sous l’égide du Bureau des Nations Unies au Burundi et le Gouvernement et pour se rendre compte, sur terrain, de l’observation des principes démocratiques. N’est-ce pas un signe de transparence ?

5. Malheureusement, au regard de certaines des manœuvres dilatoires de l’opposition, on se rend compte que ces acteurs politiques ne s’étaient pas préparés pour les élections en 2015. En guise d’exemple, je retrace ici quelques faits marquant le récent parcours d’un des politiciens de l’opposition M. Alexis Sinduhije, Président du MSD, qui passait la semaine dernière sur France 24 comme faisant parmi les promoteurs d’un Conseil National pour le Respect de l’Accord d’Arusha et de l’Etat de Droit au Burundi.

6. Fin 2012, M. Alexis Sinduhije a donné une interview au journal IWACU . A la question de savoir s’il pensait à 2015, M. Sinduhije a répondu que « 2015 ne peut pas être dans le schéma des perspectives politiques au Burundi. » Et d’ajouter qu’à son humble avis, « sauf s’il y a miracle, nous sommes embarqués dans un processus révolutionnaire d’au moins 3 ans et donc pas de place pour les élections. »

7. Déjà, en décembre 2011, un rapport d’experts des experts des Nations Unies citait M. Alexis Sinduhije comme étant parmi les fauteurs de troubles à l’Est de la République Démocratique du Congo2.

8. Le 8 mars 2014, le même Sinduhije a organisé un mouvement insurrectionnel quand des jeunes, sous l’emprise de la drogue, ont pris en otage des éléments de la police et les ont désarmés. La communauté internationale a largement condamné cet acte.

9. Fin 2014, M. Sinduhije a tenu plusieurs séances de formation, à Kampala en Ouganda, à l’endroit des jeunes leaders de l’opposition burundaise pour, a-t-on dit à la presse, « leur apprendre les techniques de soulèvement ».

10. Début 2015, un groupe armé a attaqué la province Cibitoke, en provenance de l’Est de la RDC. Ce groupe qui a été défait avait comme objectif, selon les documents saisis, de perturber le processus électoral au Burundi.

11. Fin avril 2015, des manifestations violentes ont éclaté au Burundi et sont devenues très intenses dans les quartiers – fief du MSD, le parti de M. Sinduhije. Des jeunes brûlaient des pneus, des maisons, et mêmes des personnes. Ils ont utilisé la carte de l’intimidation pour empêcher toute activité à Bujumbura. Les habitants de Musaga, Nyakabiga, Mutakura et Ngagara se sont vus interdire tout mouvement car les rues étaient bloquées.

12. Le Burundi vient de subir une autre attaque armée qui a été vite étouffée, plusieurs armes saisies et plus de 250 jeunes gens arrêtés. Curieusement, la plupart de ces jeunes viennent de ces quartiers contestataires et ont subi une formation de quelques semaines avant d’être largués sur le champ de bataille. La revendication de cette attaque a été faite par le Gén. Léonard Ngendakumana, l’un des putschistes du 13 mai dernier, mais cette attaque a été endossée par M. Alexis Sinduhije, via France 24.
13. Cet exemple pris au hasard démontre donc que l’opposition burundaise ne s’avait point préparé les élections mais plutôt s’organise depuis très longtemps pour les perturber.

14. Si certains partis politiques n’ont pas organisé des meetings, c’est principalement par soucis financiers. Ils évoquent alors des prétextes fallacieux comme « l’insécurité » alors que tout le monde sait très bien qu’une campagne électorale demande des moyens financiers colossaux. Ils ont alors adopté un autre style de battre campagne, le porte-­‐à-­‐porte. Depuis 2011 l’opposition disait à qui voulait l’écouter qu’elle présentera un candidat unique. Arrivé en 2015, elle n’a pas pu s’entendre sur ce candidat. C’est en ordre dispersé qu’elle se représente aux élections, comme en 2010, et elle continue à blâmer le pouvoir de la diviser.

15. Sur mon compte Twitter j’ai soulevé un certain nombre de questionnements que je ne pourrais peut-­‐être pas développer entièrement.

16. J’ACCUSE ici l’Union Européenne de rester silencieuse face à l’armement des jeunes et aux attaques armées contre le Burundi. Tous les médias ont fait échos d’une rébellion qui a attaqué le Burundi et ont fait intervenir des acteurs qui en ont revendiqué la paternité. Le Burundi a été à plusieurs reprise pendant ces derniers mois, endeuillé par d’attaques à la grenade. D’innocentes personnes ont succombé face à ce terrorisme sans nom. Sur la chaîne Kényane KTN Gén. Léonard , l’un des putschistes du 13 mai dernier, en a revendiqué la responsabilité. Y’aurait-­il eu une quelconque condamnation de la part de l’Union Européenne? Le Parlement Européen s’est­‐il réuni et a­ t­‐il sorti une résolution quelconque ? Parmi les rebelles arrêtés et d’autres qui se sont rendus la semaine dernière au Burundi, il y a une quarantaine d’enfants soldats. Auriez-­vous entendu ou lu une quelconque déclaration de l’Union Européenne? Que signifie ce silence de la part de ceux qui se réclament être des défenseurs des droits de la personne humaine, en l’occurrence l’Union Européenne.

17. POURQUOI LA PRESIDENTIELLE AU 21 JUILLET 2015 ? Ceux que j’ai rencontrés, ici, me rappellent que le Sommet de l’EAC avait demandé au pouvoir de Bujumbura de reporter la Présidentielle au 30 juillet 2015. Ils accusent donc le Gouvernement du Burundi de ne pas avoir mis en application cette décision. Eh bien, il est utile de se remémorer les conclusions des sommets du 13 mai et du 31 mai de la même Communauté des Etats de l’Afrique de l’Est. Toutes rappelaient que tout report des élections ne devait pas aller « au delà des délais limites de la Constitution de la République du Burundi ». Ainsi donc, le Gouvernement ne pouvait pas se permettre une violation fragrante de la Constitution en organisant la présidentielle au 30 juillet 2015 car tout simplement ce serait une « Haute Trahison » de la part du Chef de l’Etat.

18. En effet, l’article 103 de la Constitution de la République du Burundi stipule que « l’élection du Président de la République a lieu un mois au moins et deux mois au plus avant l’expiration du mandat du Président de la République ». Hors, le Président actuel a prêté serment le 26 août 2010. Ce qui veut dire que deux mois au plus c’était le 26 juin 2015 et un mois au moins c’est le 26 juillet. Si nous sommes d’accord qu’il faut quelques jours pour dépouillement, la compilation et la proclamation des résultats provisoires et qu’il faut prévoir un temps de recours tout en programmant un éventuel deuxième tour, on comprend bien que le Gouvernement ne pourrait même pas courir le risque de placer cette élection exactement le 26 juillet. Il faut une marge de manœuvre.

19. Aussi, en demandant de repousser la présidentielle au 30 juillet, le Sommet n’avait pas pris compte de la programmation de l’élection sénatoriale au 24 juillet. Selon le Code Electoral burundais, en son article 1, qui précise l’ordre des scrutins, la Présidentielle ne peut avoir lieu après l’élection des Sénateurs.

20. Inutile de rappeler que le calendrier électoral initialement arrêté était le produit d’un consensus entre tous les acteurs socio-­‐politiques burundais et que par ailleurs, la Communauté Internationale avait, dans son ensemble, salué l’adoption, par consensus, du Code Electoral burundais. Il serait donc inapproprié et illégal d’organiser une élection présidentielle au 30 juillet. Ce serait d’ailleurs la même opposition qui reviendrait au créneau pour accuser le Président de la République de violer la Constitution.

21. DES HAUTS – CADRES DU CNDD-­‐FDD QUI FONT DEFECTION ? Ils font couler beaucoup d’encre et de salive, en occident. Le Deuxième Vice-­Président de la République du Burundi, Gervais Rufyikiri et le Président de l’Assemblée Nationale, Pie Ntavyohanyuma. A ceux-­‐là s’ajoutent quelques anciens cadres du Cndd-­‐Fdd qui ont emprunté la voix de la fronde. Mais alors, pourquoi jeter l’éponge à la fin de son mandat ? Est-­‐ce vrai qu’ils ont trouvé exile en Belgique comme nous l’a fait entendre France 24 ?

22. Le Président de l’Assemblée Nationale a annoncé sa défection le 28 juin, à la veille de l’élection législative du 29 juin, laquelle logiquement procédait au remplacement de l’Assemblée Nationale. De son côté, l’Ir Gervais Rufyikiri a participé au dernier Conseil des Ministres de la présente législature. N’est-­‐ce pas pure manipulation de l’opinion que de déclarer être fugitif au moment où on se sauve le plus tranquillement du monde, avec protocole, ordre et frais de mission, sourire aux lèvres ? C’est même un blasphème pour les centaines de milliers de burundais qui ont connu la vie de réfugié et de fugitif. La réalité réside dans la confection des listes électorale. Certains de ceux qui n’ont pas été placés sur ces listes ont alors préféré œuvrer pour la démolition de l’édifice. « Autant que tout s’effondre »

23. IMBONERAKURE, UNE MILICE ARMEE ? La ligue des jeunes du Cndd-­Fdd, Imbonerakure, a toujours été accusée de détenir des armes et de subir des entraînements paramilitaires. Ce qui est paradoxal est que chaque fois qu’une cache d’armes est découverte ou chaque fois que des individus sont arrêtés en possession illégale d’armes, ils appartiennent à l’opposition. Et la presse locale et internationale n’en fait pas échos suffisamment échos. Des exemples sont légion. La semaine passée, à Muyinga, c’est une cache d’une centaine d’armes qui a été découverte, à Muyinga. Et les personnes arrêtées appartiennent toutes à la nouvelle coalition « Amizero y’Abarundi » dirigée par l’ancien rebelle Agathon Rwasa. Et dans les quartiers qui se sont rendus célèbres dans la contestation du candidat Pierre Nkurunziza à la présidentielle de 2015, Musaga, Nyakabiga, Mutakura et Ngagara, des crépitements d’armes se font entendre chaque nuit. Est-­‐ce le fait des Imbonerakure ? Est-­‐ce logique, pour l’opposition qui accuse le pouvoir d’armer une jeunesse, sans en apporter la moindre preuve, de procéder, au vu et au su de tout le monde, y compris la Communauté Internationale, à l’armement de sa propre jeunesse ?

24. EN CONCLUSION, beaucoup se dit sur le Burundi mais est-­‐ce réellement la réalité sur terrain ? J’invite la presse étrangère à s’informer davantage, plutôt que de se baser sur ce qui circule sur différents blogs ou les positions affichées par certaines organisations internationales. Le peuple burundais mérite mieux que la campagne de médisance qu’il subit actuellement.

Willy Nyamitwe Conseiller Principal chargé
des Questions de Presse, Information et Communication
Tél. +257-­‐79.30.50.80
E-­‐mail : willy.nyamitwe@burundi.gov.bi
Twitter : @willynyamitwe