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Dans la conférence de presse de ce jeudi 17 décembre, dont l’objectif était de clarifier certaines questions en rapport avec la coopération internationale, le ministre burundais des Relations extérieures, Alain-Aimé Nyamitwe a évoqué les relations entre le Burundi et la Belgique en soulignant l’importance du respect mutuel entre les deux pays.
belgique_colon.jpgCertaines mauvaises langues en ont profité pour attribuer à la Belgique un rôle paternel sans s’empêcher d’ailleurs de verser dans l’amalgame en confondant carrément la Belgique et l’Union Européenne. Ce n’est pas la première fois que quand on touche à la responsabilité de la Belgique dans tragédies qui endeuillent cycliquement le Burundi, des voix burundaises mal informées ou tout simplement fondées sur l’ignorance s’élèvent pour défendre l’indéfendable.

OUI, LA BELGIQUE EST COUPABLE.

Sans revenir sur les autres crimes abominables commis par la Belgique au Burundi, je voudrais aller tout droit sur l’assassinat du Prince Louis Rwagasore, Premier Ministre du Burundi issue des élections démocratiques de 1961.
Dans son ouvrage, L’assassinat de Rwagasore, le Lumumba burundais, publié en 2012 à l’occasion du cinquantième anniversaire du Burundi le journaliste Guy Poppe parle de la responsabilité de la Belgique dans l’assassinat du Prince Louis Rwagasore.
Mais c’est surtout les travaux de l’historien belge Ludo De Witte qui présente de façon exhaustive et analytique comment la Belgique s’est investie jusqu’au sommet de l’Etat dans ce dossier en en connaissant les conséquences dévastatrices. Dans son travail du 8 juillet 2013 intitulé L’assassinat du Premier ministre burundais Louis Rwagasore, D’étonnants documents d’archives sur l’implication de la Belgique , cet universitaire belge se fonde sur le proverbe burundais « La vérité passe par le feu mais ne brûle pas» pour mettre en lumière la vérité sur cet assassinat, en se basant sur des documents concrets d’archives qu’il a pu avoir à sa disposition.
Dans ce travail on peut lire les lignes qui suivent :
« C’est dans l’intérêt de la vérité. C’est dans l’intérêt du Burundi dont l’avenir a été lourdement hypothéqué par cet assassinat. Car le nationaliste Rwagasore était parvenu à rassembler Hutu et Tutsi dans la lutte pour l’indépendance et son élimination a constitué un premier pas vers les tensions ethniques – d’abord entre les dirigeants de l’UPRONA, plus tard dans le pays tout entier – qui ont dégénéré par la suite pour aboutir aux massacres, aux épurations ethniques et à la guerre civile : des centaines de milliers de Burundais en sont morts. Cette transparence a quelque chose aussi d’indispensable en raison de l’intérêt qu’il y de bien mettre en évidence la leçon que comporte cette histoire qui nous enseigne qu’il est sain de se méfier des visées impériales de Bruxelles, de Paris ou de Washington et que cette salutaire méfiance n’a vraiment rien d’excessif »

Ce que le Burundi vit aujourd’hui est donc une conséquence d’une vieille politique que de Bruxelles, Paris et Washington au Burundi. N’en déplaise Athanase Karayenga, leur véreux défenseur. Ce n’est pas une première que la Belgique tente de faire obstruction à l’action de la justice burundaise. Elle a fait de même en 1962 en essayant de couvrir les assassins du Prince Rwagasore. Elle a exercé des pressions énormes sur le Burundi pour consacrer l’impunité de ces assassins comme elle veut le faire aujourd’hui pour les putschistes et autres criminels. Seulement elle s’est heurtée à la fermeté du roi et de la justice burundaise. C’est dans ce sens que Ludo livre ce témoignage en évoquant la réponse réservée à l’Ambassadeur de Belgique sur cette question:

« L’ambassadeur s’entend répondre également que le Burundi est conscient que « la Belgique est à même de réduire le Burundi à la misère pour de longues années, mais qu’ils jugent cela préférable à des troubles dans le pays. »

Cette réponse des autorités burundaises de 1962 ne diffère pas tellement de la déclaration du ministre Nyamitwe à part que ce dernier fonctionne dans un cadre d’une coopération déjà diversifiée où l’arrogance de la Belgique ne saurait plus se justifier. La Belgique en est elle-même consciente. C’est pour cela qu’elle se camoufle derrière la France pour ses propositions de résolutions au Conseil de Sécurité des Nations Unies, et qu’elle passe par l’Union Européenne pour ses autres magouilles, sachant bien que l’Union Européenne a une grande influence sur l’Union Africaine dont elle finance le budget à concurrence de plus de 70%.

QUE VEUT LA BELGIQUE AUJOURD’HUI ?

Aujourd’hui, la Belgique fait comme elle a toujours fait et elle espère que cela va fonctionner parce qu’elle y met tout le paquet. Elle veut s’opposer à l’exercice de la démocratie au Burundi parce que celle-ci implique une gouvernance transparente qui risquerait de mettre à nu devant le peuple burundais sa responsabilité historique dans les drames cycliques qui se succèdent au Burundi. La Commission Vérité et Réconciliation qui vient de commencer son travail au Burundi ne doit pas être du goût de Bruxelles, Paris et Washington de même que les nouvelles méthodes de travail du gouvernement basées sur l’encadrement direct de la population, la diversification de la coopération qui donnent des résultats directs et risquent d’assurer l’indépendance économique du pays. Elle croit que la révision de sa coopération risque d’asphyxier le Burundi et que ce chantage peut contraindre le gouvernement du Burundi à accepter n’importe quoi comme celui de 1972, comme le dit le chercheur belge Ludo :
« En 1972, le gouvernement de l’époque est sous les feux de l’actualité mondiale en raison des massacres à grande échelle de Hutu, présentant les caractéristiques d’un génocide en gestation. Bujumbura, en porte-à- faux avec l’Occident, se défend en publiant un « Livre blanc ». Dans ce « Livre blanc », Bujumbura rappelle l’assassinat de Rwagasore. Le Résident Regnier y est nommément désigné comme l’ « organisateur » de l’assassinat du Premier ministre burundais et une petite phrase fait allusion aux « aveux de Regnier devant le Parquet de Bruxelles ». Petite phrase sans doute en guise d’avertissement à Bruxelles… Par la suite, Bujumbura n’est plus jamais revenu sur la chose, sans doute pour ne pas mettre en danger les relations avec Bruxelles et ne pas compromettre l’aide au développement dont le pays avait et a toujours tellement besoin »
Le gouvernement actuel qui ne se reproche de rien et qui est le résultat d’élections démocratiques, pourrait sans aucun doute se passer de toute coopération qui n’est pas basée sur le respect mutuel ou qui a tendance à subventionner le mensonge et cacher sa déliquescence plutôt que d’offrir une vision, un avenir et de l’espoir, avec honnêteté, responsabilité et sens politique, en s’abstenant de porter atteinte à l’indépendance et à la souveraineté du Burundi.

Il est temps que la Belgique et ses alliés, après ces 53 ans de guerre contre le Burundi acceptent de mettre fin aux violences. Il faut qu’ils cessent de diviser les frères et sœurs burundais et de semer impitoyablement la mort. De leur part, les Burundais joueront leur partition dans le dialogue et la concertation qui les ont toujours caractérisés.

N’est-il pas flagrant maintenant, avec les récents aveux de Louis Michel, père du Premier Ministre Charles Michel que les plans diaboliques de destruction de tout régime démocratique au Burundi sont concoctés en Belgique? La haine affichée par Louis Michel contre le Burundi ne pourra pas nécessairement précipiter le Burundi dans le chaos mais elle conduira ce forcené à sa propre disqualification par ailleurs déjà atteint un point de non retour. Après avoir côtoyés des hommes respectables qu’il a sans aucun doute fini par fatiguer, il s’est rabattu sur la compagnie de l’impudique Maggy qui le jettera, comme elle en a l’habitude, dans la rue. La rue, voilà la fin de Louis Michel puisque la folie il l’a déjà.

Minani Claver