“Le Burundi est passé de 300 milliards Fbu de taxes et impôts collectés en 2010, à 720 milliards Fbu aujourd’hui”
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Depuis la province de Muyinga où se déroulait une foire organisée par l’Office Burundais des Recettes (OBR), Audace Niyonzima, Commissaire Général de cette institution souligne que le Burundi est loin d’être parfait en matière de civisme fiscal mais qu’avec notamment les campagnes d’éducation, “le contribuable paie de plus en plus taxes et impôts avec fierté”. Une interview en marge des cérémonies de la deuxième édition de la Journée du Contribuable.

Audace Niyonzima, Commissaire Général de l’OBR lors de l’interview à Muyinga

La Journée du Contribuable, quelle est sa raison-d’être ?

La raison d’être est changer l’image de l’activité de collecte de la taxe et de l’impôt, la conception traditionnelle étant que la taxe est obligatoire, la taxe doit être recouvrée par force. On veut amener le contribuable à payer la taxe avec fierté

Deuxième journée du contribuable. Quelle a été la plus-value de la première?

La plus-value de la première édition est que le niveau d’éducation à payer taxes et impôts a augmenté. La preuve est la croissance du taux de paiement des taxes. Nous sommes en effet passés de 300 milliards de francs burundais en 2010 à plus de 720 milliards aujourd’hui.

Pourquoi Muyinga et pas ailleurs ?

Le principe était que la deuxième journée soit célébrée à l’intérieur du pays. C’est le gouverneur de Muyinga qui a reçu le prix l’année passée. La province de Muyinga a été choisie pour reconnaître et épauler les efforts de l’administration qui a beaucoup contribué à la lutte contre la fraude et à l’éducation au civile fiscal.

Des campagnes de sensibilisation au civisme fiscal, des mesures de répression de la fraude comme la brigade anti-fraude, le numéro vert, 10% de la valeur des produits fraudé au dénonciateur, etc. Quel est le résultat de tous ces efforts sur la situation de la fraude dans le pays ?

La fraude, un phénomène complexe contre lequel il faut lutter constamment. La fraude a sensiblement diminué suite à la multiplication des stratégies de lutte surtout dans les zones frontalières du Burundi comme dans la province de Muyinga et dans le Sud et l’Est du pays. La baisse très sensible de la fraude a été facilitée par la collaboration entre l’administration fiscale, l’administration locale et la population elle-même.

Des campagnes d’immatriculation de nouveaux contribuables. Quel résultat ? Combien d’immatriculés font leur déclarations dans la foulée des campagnes de l’OBR ?

C’est un chiffre qui fluctue au fur et à mesure. Nous avons déjà identifié plus de six mille additionnels à la suite de la campagne du mois passé.

Pourtant en nombre très réduit, les grands contribuables versent à eux seuls 80% en termes de taxes et impôts. Avez-vous une stratégie pour augmenter leurs effectifs ?

Les stratégies il y en a. C’est notamment faire la promotion des investisseurs. L’OBR a organisé par exemple la foire qui est en cours à Muyinga pour faire la promotion des produits fabriqués ici au Burundi. Et nous pensons qu’avec cette activité, le nombre d’investisseurs utilisant la matière locale dans leur produits va augmenter et ainsi va augmenter le nombre de grands contribuables.

L’Agence pour la Promotion des Investissements (API) enregistre bien des entreprises nouvellement créées. Quels serait l’impact du nombre des entreprises agréées par API sur les recettes collectées par OBR? Bien d’entreprises ne jouissent-elles pas d’exonérations dans le cadre du Code des Investissement mais tardent à afficher ou n’affichent même jamais la plus-value sur les recettes de l’Etat?

Les tricheurs ne manquent pas. C’est pour cela que l’Etat a mis en place une commission pour identifier les entreprises qui ont bénéficié des exonérations et qui les auraient détournées. L’OBR est toujours dans l’étape d’identification des avantages qui ont été accordés à ces investisseurs. Le rapport final n’est pas encore disponible. Mais ce cas n’est pas général car il y a des entreprises qui ont investi, j’en prends pour preuve les hôtels bâtis et les usines construites.

Où se trouve le blocage pour le progiciel E-Tax qui permettrait l’existence d’une facture électronique?

Pas de blocage. Le projet est en cours. Le gouvernement a déjà donné son accord, il reste à mobiliser les financements. Aussi les équipes techniques sont prêtes pour la mise en place du projet qui pourra être lancé avec le premier trimestre de l’année 2018.

Il y a au Burundi beaucoup de contribuables qui vivent dans une sorte de paradis fiscal par le fait que l’OBR ne maîtrise pas leur facturation…

Pour ceux qui pensent que le Burundi est un paradis fiscal, moi je n’en sais rien. Les recettes sont bien collectées. Les lois qui sont appliquées sont bien élaborées et bien mises en application.

Pourquoi l’OBR ne ferait pas payer un forfait (par exemple 30 ou 50 mille par an) aux petits commerçants encore dans l’informel? Paraît que ces petits commerçants sont prêts à payer directement. Ce sont des milliers de petits restaurants, cabarets, boutiques, etc.

L’OBR collecte les taxes et impôts qui sont établis par la loi comme la loi sur la TVA, sur la fiscalité communale et autres lois. L’OBR est en train de réviser le prélèvement forfaitaire sur la loi sur la fiscalité communale et sur les procédures fiscales pour permettre d’améliorer le niveau de collecte

Saga Plage fermé par l’OBR. Un éclairage de votre part ?

Pour le cas de Saga Plage, l’OBR a décidé de fermer ses portes car cette institution avait des arriérés de taxes et d’impôts. Après la fermeture, ils ont déjà réglé le principal du montant de plus de 629.000.000 Fbu. Il reste les pénalités appliquées après 2 ans d’activité sans paiement.

Que dire des commerçants qui quittaient le pays soi-disant que le taux de fiscalité appliqué par OBR est excessif ?

C’était des opérateurs économiques qui étaient avant habitués à travailler dans l’illégalité, dans la fraude. Quand l’OBR a commencé à les fiscaliser ils ont senti que l’OBR pesait sur eux. Depuis qu’on a commencé l’éducation au civisme fiscal, il n’y a plus de plainte.

by Philippe Ngendakumana