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rapport_insurrection_final_1_.pdfDans sa lettre N/Réf.552/10/347/BV/2015 du 29 avril 2015, le Procureur Général de la République a mis en place une commission chargée d’enquêter sur le mouvement insurrectionnel déclenché le 26 avril 2015.

La commission avait pour mission de mener une enquête judiciaire en amont et en aval sur le mouvement insurrectionnel afin d’identifier ses auteurs et la part de responsabilité de chacun afin de les traduire devant la juridiction compétente.

Le droit pénal positif burundais définit la notion de mouvement insurrectionnel ainsi qu’il suit :
De par l’article 607 de la loi n°1/05 du 22 avril 2009 portant révision du Code Pénal du Burundi, « ‘le mouvement insurrectionnel’, s’entend d’un mouvement collectif qui s’extériorise, soit par des actes portant atteinte aux pouvoirs et aux institutions établis, soit par des agressions contre les personnes, la dévastation ou le pillage ».
Par ailleurs, afin de lever tout équivoque ou amalgame, la commission a aussi exploité la loi N°1/28 du 5 décembre 2013 portant réglementation des manifestations sur la voie publique et réunions publiques qui précise le cadre légal des manifestations.

Il est constant que des faits répréhensibles ont été commis. En effet, les personnes qui ont préparé et mis en exécution ce mouvement ont commis beaucoup de forfaits. Les responsables de ces faits sont de plusieurs horizons : Société civile, hommes politiques ; militaires et policiers.

DE L’EVALUATION PROVISOIRE DES DEGATS.
Nous venons de le dire dans les précédentes lignes que les dégâts engendrés par l’insurrection sont énormes. Les dégâts ont touché beaucoup de secteurs et, à la production du présent rapport, certains dommages ont été déjà provisoirement évalués.
A ce titre, la commission a pu enquêter dans certaines institutions pour avoir l’évaluation provisoire des dégâts qu’elles ont déjà subies à la suite de ce mouvement. Ainsi :
l’Office Burundais des Recettes a enregistré durant ce trimestre concerné par le mouvement insurrectionnel un manque à gagner de quarante-sept milliard huit cent million de francs burundais (47 800 000 000Fbu) ;
L’office des Routes a enregistré des dégradations des routes qui s’évaluent, à la production du rapport, à deux cent soixante-deux millions six cent deux mille francs burundais ( 261 602 000 Fbu) ;
La Police Nationale du Burundi estime provisoirement les dégâts matériels qu’elle a subis à trois cent dix-neuf millions cent quatre-vingt-un mille quatre cent cinquante-sept francs burundais (319 181 457 Fbu)
La Force de Défense Nationale a enregistré des dégâts estimés provisoirement à sept cent quatre-vingt-douze millions huit cent trente un mille quatre cent francs (792 831 400 Fbu) ;
La Mairie de Bujumbura a encaissé des dégâts estimés à deux cent millions sept cent quatre-vingt-sept mille deux cent cinquante francs burundais ( 200 787 250 Fbu) ;
Les Services Techniques Municipaux (SETEMU) ont enregistrés des dégâts estimés à la production du présent rapport à quatre-vingt-onze million sept cent mille francs burundais (91 700 000 Fbu) ;
BUMEREC a subi des dommages évalués à trois cent vingt-neuf millions sept cent mille francs burundais (329 700 000Fbu) ;
L’Office du Thé du Burundi (OTB) a subi des dommages évalués à quatre cent treize millions cent cinquante mille cinq cent soixante-dix-neuf francs burundais ( 413 150 579Fbu) ;
Global Port Services Burundi (GPSB) a subi des dommages évalués à cinq cent quatre-vingt-dix-neuf millions onze mille deux cent quatre-vingt francs burundais (599 011 280Fbu) ;
Viettel Burundi a subi des dommages évalués à cent soixante-douze millions six cinquante mille francs (172 650 000Fbu) ;
Le parti CNDD-FDD a enregistré des dommages de cent cinquante millions de francs burundais (150 000 000Fbu).
Reuben’s Graphics Company (RGC) a subi des dommages évalués à Huit millions deux cent cinquante-huit mille francs burundais (8 258 000 Fbu).
Il faut souligner que cette évaluation est provisoire et ne tient pas compte des dommages humains. En effet, au moment de la production de ce rapport, le nombre de personnes qui ont péri dans cette insurrection n’est pas précisé du fait que les ayant droits n’ont pas déposé. En plus, pour les personnes qui ont été blessées, il faut avoir des documents médicaux pour pouvoir évaluer les dommages subis.
Somme toute, les dommages matériels provisoires déjà évalués sont de cinquante un milliard cent trente-huit millions huit cent soixante-douze mille neuf cent cinquante-six francs burundais (51 138 872 956 Fbu).

DES RESPONSABILITES
Il est constant que des faits répréhensibles ont été commis. En effet, les personnes qui ont préparé et mis en exécution ce mouvement ont commis beaucoup de forfaits. Les responsables de ces faits sont de plusieurs horizons : Société civile, hommes politiques ; militaires et policiers.
A ce titre, le dossier répressif numéro RMPG 696/MA a été ouvert pour rechercher les auteurs de ces infractions. Toutefois, à la production de ce rapport, seuls certains auteurs de ces infractions ont été appréhendés.
De l’enquête déjà menée, les organisations de la société civile qui ont pris part à l’organisation de cette insurrection sont regroupées dans ce qu’on appelle Campagne « Halte au 3ème mandat » du Président NKURUNZIZA. Ce sont notamment :

NOM DE L’ASSOCIATION
REPRESENTANT
1
FORSC
NSHIMIRIMANA Vital
2
Fontaine ISOKO
NGENDAHIMANA Christian
3
Ligue ITEKA
Prof. KAZOVIYO Gertrude
4
SPPDF
SINDAKIRA Bernardine
5
APRODH
MBONIMPA Pierre Claver
6
ACAT Burundi
Me NIYONGERE Armel
7
FOCODE
NIYUNGEKO Gordien
8
PARCEM
NTAWE Richard
9
AREDDHO
NDAYISHEMEZE Denis
10
RCP
NIBIGIRA Gervais
11
Syndicat STEB
NIBIZI Eulalie
12
OAG
MANIRAMBONA Godefroid
13
AJMA
NDUWIMANA Jean
14
RUHUKA BANA
NIYONKURU Selemani
15
MM
NDAYISENGA Adélaïde
16
AJCB
GATOGATO Jean Marie Vianney
17
CHOUIFE
MUJIJI Joseph
18
AMINA
KATIHABWA Charles
19
AREVIE
HABONIMANA Nixon
20
BIRATURABA
NIYONZIMA Edouard
21
AAN
SABUSHIMIKE Mamer
22
ACOPEC
NDAYISENGA Marc
23
ATU
KANYANGE Caritas
24
CB.CPI
Me NIGARURA Lambert

FONTAINE ISOKO
NGENDAHIMANA Christian
En plus de ces organisations membres de la campagne « Halte au 3ème mandat », il faut signaler que BARANKITSE Marguerite a, elle aussi, contribué dans cette insurrection.
Aux côtés de ces organisations dites de la société civile, certains partis politiques se sont impliqués dans ce mouvement. Ce sont notamment :

PARTI POLITIQUE/COALITION
REPRESENTANT
1
MSD
SINDUHIJE Alexis
NYAMOYA François
KAGWIRE Peggy
2
AMIZERO Y’ABARUNDI
NDITIJE Charles
3
SAHWANYA FRODEBU
NGENDAKUMANA Léonce
BAMVUNGINYUMVIRA Fréderic
4
FRODEBU NYAKURI IRAGI RYA NDANDAYE
Dr MINANI Jean
5
UPD ZIGAMIBANGA
MUGWENGEZO Chauvineau
6
ADC-IKIBIRI
NGENDAKUMANA Léonce
L’enquête révèle également que d’autres hommes politiques comme NTIBANTUNGANYA Sylvestre, NDAYIZEYE Domitien et NDABITOREYE Audifax ont également contribué énormément dans cette insurrection.
Par ailleurs, de l’enquête menée, il a été constaté que tout se passait en concertation étroite entre ceux qui préparaient le coup d’Etat et les insurgés. De ce fait, tous ceux qui sont impliqués dans le dossier relatif à l’atteinte à l’autorité de l’Etat sont mutatis mutandis impliqués dans les infractions relatives à cette insurrection. En effet, quand ces putschistes ont été interrogés, ils affirment qu’ils venaient réaliser les desideratas des « manifestants ». Ils ne pouvaient donc pas venir réaliser les desideratas d’une insurrection dont ils ne savent pas les tenants et les aboutissants. Le putsch est donc venu en couronnement à l’insurrection.
A la production du présent rapport, au-delà des personnes déjà arrêtées dans le cadre de la présente commission, beaucoup d’autres insurgés ont été arrêtés et leurs dossiers sont instruits au Parquet en Mairie de Bujumbura et dans d’autres parquets.
Voici ci-dessous la liste des personnes déjà arrêtées dans le cadre de la commission d’enquête :
NIMPAGARITSE Léonidas alias Rais NYEGANYEGA ;
NSHIMIRIMANA Epitace ;
NAHIMANA Ildephonse;
HARUSHA Boniface;
NDAYISENGA Jean Claude ;
NKURUNZIZA Pacifique ;
NTAHOTURI Ildephonse ;
MUGANGA Placide ;
SINDAYIGAYA Donatien ;
NKURUNZIZA Venuste ;
NINTERETSE Nestor;
MFURANZIMA Elvis;
NDUWIMANA Claude;
NIZIGAMA Sophonie ;
NIYONZIMA Samuel ;
NIYONZIMA Samuel alias Sam Rachid ;
NDEREYIMNA Ismail Billy.
Toutes ces personnes, arrêtées et recherchées, sont pénalement et civilement responsables des infractions de détention illégale d’armes à feu ; participation à un mouvement insurrectionnel ; coups et blessures volontaires graves ; destructions méchantes ; assassinat ; atteinte à la sûreté intérieure de l’Etat et d’attentat contre l’autorité de l’Etat. Ils sont tenus de réparer tous les dommages causés par ces infractions.

CONCLUSION
Au terme de ce travail, il est constant que certains politiciens des partis de l’opposition, les leaders de certaines associations de la Société Civile, certains militaires et policiers ainsi que certain hommes et femmes d’affaires sont à l’actif de ce mouvement insurrectionnel. Des signes avant-coureurs se sont manifestés au début du mois d’avril. Cependant, il a fallu que Parti CNDD FDD rende public son candidat aux élections présidentielles 2015 pour que le mouvement augmente d’ampleur. De plus les reportages en direct de ces manifestations par certains médias privés ont également contribué à accroître l’allure de cette insurrection jusqu’à son couronnement par le coup d’Etat du 13 mai 2015.
Ce mouvement s’est extériorisé par le rassemblement des personnes mobilisées à cette fin. Ces personnes insurgées ont posé des actes qui portent atteinte aux pouvoirs et aux institutions établies. Elles ont également agressé des personnes allant jusqu’à les tuer. De même, plusieurs biens tant meubles qu’immeubles publics ou privés ont été soit détruits soit saccagés. A la production du rapport les dégâts déjà évalués sont estimés à cinquante un milliard cent trente-huit million huit cent soixante-douze mille neuf cent soixante-six franc burundais (51 138 872 956 Fbu). Cette évaluation reste provisoire car les dommages humains ne sont pas évalués. Ils feront objet d’évaluation dès lors que le dossier sera fixé devant la juridiction du fond pour jugement.
Ces actes de barbarie constituent des infractions diverses. Ces infractions ont été commises par les mêmes auteurs sans qu’une condamnation définitive soit intervenue pour au moins l’une d’elles. Ce mouvement comprend des faits qui constituent des infractions distinctes (assassinat, destructions méchantes, coups et blessures volontaires graves, détentions illégales d’armes à feu, etc) et sont unis entre eux comme procédant d’une intention délictuelle unique et comme étant les uns des circonstances aggravantes des autres. C’est donc un concours idéal d’infractions.
A ce titre, le dossier répressif numéro RMPG 696/MA a été ouvert pour rechercher les auteurs de ces infractions. Toutefois, à la production de ce rapport, seuls certains auteurs de ces infractions ont été appréhendés. Les auteurs intellectuels comme NINAHAZWE Pacifique, NSHIMIRIMA Vital, NIYONGERE Armel, KAGWIRE Peggy, tous ceux qui sont repris dans la liste des responsables membres des organisations « Halte au 3ème mandat » et quiconque dont l’enquête révèlera qu’il a contribué de près ou de loin dans ce mouvement insurrectionnel restent recherchés pour qu’ils soient traduits en justice et répondent des faits retenus à leurs charges.
De même, les vingt-huit personnes déjà arrêtées et ceux qui sont recherchés qui sont impliquées dans le putsch manqué du 13 mai 2015 sont solidairement tenus responsables avec les organisateurs et meneurs de ce mouvement insurrectionnel.
Somme toute, à la production de ce rapport, l’instruction de ce dossier n’est pas terminée. Le Parquet devant qui il sera transmis est appelé à continuer et terminer cette instruction.

POUR LA COMMISSION
MANIRAKIZA Adolphe, Président
NIYONZIMA Hyacinthe, Membre
NDAYISABA Richard, Membre
NTUKAMAZINA Thomas, Membre.

La rédaction