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Buyoya, ses Hutu et la stratégie du serpent à sonnaille

Un internaute à l’intelligence aiguë écrivait à peu près ceci : « Si l’opposition semble désordonnée et sans tête, c’est que la tête se cache ailleurs : Buyoya ». Je me suis alors souvenu d’un documentaire de National Geographic, qui montrait comment le serpent à sonnaille attirait ses proies : il s’enfonçait tout entier dans le sable, en laissant à découvert le petit bout de queue semblable à un gros insecte. En l’agitant, les lézards s’approchaient croyant avoir trouvé un repas facile, et en une fraction de seconde, le serpent se détendait, happait et commençait à engloutir ces aventuriers.

Buyoya est en effet le maître d’orchestre de la crise que le Burundi traverse, parce qu’il veut non seulement retourner au pouvoir, mais il veut restaurer l’ordre ancien, anti-Arusha, où tout le pouvoir était concentré dans les mains d’une seule province, et d’un sous-groupe ethnique, les hima. Quand ses émissaires chantent qu’ils luttent pour l’Accord d’Arusha, c’est archifaux. C’est tout le contraire. C’est en effet l’Accord d’Arusha qui est en train de couper l’herbe sous les pieds de l’oligarchie de Matana-Bururi, en redistribuant le pouvoir sur tout le territoire national et entre toutes les ethnies. Si Buyoya reprenait le pouvoir, l’Accord d’Arusha deviendrait un chiffon de papier, comme d’ailleurs a fait Kagame au Rwanda, car là aussi ils avaient signé l’Accord d’Arusha.

Et les Hutu, quel est leur rôle ? Si Ndadaye a laissé derrière lui une pépinière de millions de Ndadaye, forts, courageux, prêts au sacrifice pour le peuple burundais, le lugubre Ngeze a fait aussi des émules. Le malheur de beaucoup de hutu vient de leur faiblesse en mathématique sociale. Ils sont en effet très forts en math au tableau, mais quand il s’agit de mesurer les situations, ils n’y arrivent pas. Permettez-moi d’utiliser une métaphore scolaire. Les Hutu (en général) savent résoudre l’équation à une inconnue : ils apparaissent comme ils sont, et chaque situation est réellement comme elle se présente. Ils ne savent pas regarder au-delà. Même l’Evêque Ntamwana est tombé dans le piège avec sa sortie de « Sindumuja ». Cela s’est vu au début de l’insurrection de 2015. Beaucoup de hutu s’y étaient engagés, croyant qu’il s’agissait vraiment de la lutte contre le 3° Mandat, conditionnés par le grand lavage de cerveau opéré par la RPA. Mais beaucoup se sont réveillés tout d’un coup quand deux jeunes gens, un hutu et un tutsi transitant par Nyakabiga, furent cueillis par les insurgés . Le Hutu Léonidas fut brûlé vif dans les pneus, sur le champ; le tutsi rentra allègrement chez lui. Ils comprirent alors que derrière la contestation du 3° Mandat, se cachait un autre plan secret, très pervers, la chasse aux hutu, dénommés pour la cause, imbonerakure. Le coup d’Etat du 13 mai 2015 n’était pas du tout dirigé par Niyombare (il tremblait devant les micros!) mais par Cyrille Ndayikengurukiye et ses compères hima. Le Hutu Niyombare jouait en 2015 le rôle exact de Ngeze en 1993. Et le cerveau des opérations était toujours le même, BUYOYA , avec la tête enfouie dans le sable du Sahara.

Tandis que les tutsi (en général) de par l’éducation qu’ils reçoivent en famille grandissent avec une personnalité dédoublée comme une valise à double fonds, et une tendance prononcée au mensonge (je dirais qu’ils savent résoudre une équation à deux inconnues, socialement parlant), les hutu parfois ne se réfèrent même pas à l’expérience de leur passé pour surmonter les obstacles futurs. Tenez par exemple ces Hutu gros et gras, qui paissent la tête baissée comme des vaches dans les prairies du Canada, des USA ou de Hollande . La plupart sont partis du Burundi en zigzagant à travers le sifflement des balles, poursuivis par…BUYOYA !!! A regarder de près, certains auraient même des oreilles trouées ! Ces Hutu gros et gras dont l’horizon du monde se limite à la rondeur de leur ventre, vous les verrez avec des pancartes, en manifestation contre un certain mandat, sans se rendre compte le moins du monde, que les Sindumuja avec lesquels ils marchent, sont la petite queue qu’agite le serpent à sonnaille, BUYOYA, pour les attraper et les phagocyter. Abakecuru duhendwa tubona, ego mama duhendwa tubona… C’est le cas de constater avec amertume que pour les Hutu, l’expérience est une lampe fixée au dos, qui n’illumine que le passé, pas le futur. Les Hutu, parce qu’inconscients, nonchalants, irresponsables, constituent la force que l’ennemi a toujours utilisée pour les décimer. Il est presque vrai ce ricanement cynique des génocidaires : « les Hutu se tuent eux-mêmes ». Dans les diverses attaques des bandes à Sinduhije – une autre queue à Buyoya – le gros des effectifs sont des ignorants jeunes hutu, qui ont été happés et introduits dans la rébellion parce que personne ne les avaient avertis du danger. Tandis que les jeunes tutsi y vont en sachant exactement ce qu’il vont faire : « gufata igihugu » (prendre le pouvoir).

Je ne peux pas oublier les Hutu du CNARED, qui eux aussi, sans le savoir, ont vécu une mésaventure mégagalactique. En coopérant avec Niyombare, ils ne se rendaient pas compte qu’ils constituaient un buisson où Buyoya allait se cacher pour mieux manœuvrer son coup d’Etat. Leur inconscience réside dans le fait qu’ils se sont embarqués dans un bus voulant aller à Muyinga, mais le chauffeur avait l’ordre (de Buyoya) de les porter à Kigali, une destination qu’ils ne désiraient certainement pas. Ils ont été « contraints » de jouer le jeu de Buyoya, sous la haute surveillance de Kagame. Une bande de « Ngeze », au profit d’un seul homme : Buyoya. Celui-ci voulait qu’on parle de génocide (inexistant), ils se sont mis à annoncer un génocide ! Il leur dit de braire, ils braient ; il leur dit de rugir, ils rugissent ; il leur dit de rire, ils rient. Des marionnettes. L’ex président Ntibantunganya, profitant de son séjour en Belgique a décidé de sortir de cette caravane de comédie bohémienne, où Buyoya traite ces Hutu du Cnared comme des animaux de cirque. Naturellement, puisque certains sont des PhD, ils vous diront qu’ils y voient très clair. Mais je le répète, comme certains de nos pères, ils ne savent pas résoudre une équation à deux inconnues. Si ces Hutu inconscients faussaient compagnie à Buyoya, il ne ferait plus de dégâts. Mais entre temps, la tête et le corps toujours enfouis dans le sable, le Serpent à sonnaille continue à agiter sa petite queue Sindumuja, et à moissonner des victimes. Buyoya est l’unique personne qui tire les ficelles de l’Occident, parce qu’il a accepté d’être leur serviteur fidèle. C’est lui qui empêche le payement de nos militaires en Somalie, le maître d’oeuvre des sanctions de l’UE, dans l’espoir de voir l’état s’écrouler et reprendre le pouvoir. Toutefois, grâce aux millions de Ndadaye, il risque d’attendre encore longtemps.

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