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Quelques observations

1. Un tel geste est plutôt rare dans les usages diplomatiques. Qu’un chef d’état étranger s’adresse directement au peuple d’un autre Etat au dessus des épaules de ses dirigeants légitimes, n’est pas anodin. Ces pratiques ont été observées dans des situations où deux pays étaient en guerre et que cela relevait de la guerre psychologique quand le chef d’Etat d’un des belligérants s’adressait directement à la population du pays ennemi pour la démoraliser ou pour déverser sa propagande.
Compte tenu de ce que le président des Etats-Unis Barack Obama s’est permis, on peut alors se demander si cette puissance se croit désormais en guerre contre la République du Burundi et donc que dans son volet « guerre psychologique » du conflit il ait besoin de s’adresser directement au peuple burundais pour faire sa propagande.

2. Toujours en considérant ce message de Barack Obama au peuple burundais, il apparaît que la représentation diplomatique des Etats-Unis à Bujumbura est, soit complètement déconnectée de la réalité de ce qui se passe au Burundi en général et dans la capitale Bujumbura en particulier, ou alors est solidaire et même à la base des actions terroristes des insurgés qui depuis avril 2015 sèment le désordre dans certains quartiers de Bujumbura avec le soutien des forces spéciales que Paul KAGAME, Président du Rwanda y a dépêché. Sinon, comment comprendre que Barack Obama revienne encore sur la manipulation déjà dénoncée qui avait consisté à interpréter les appels à la population à collaborer avec les forces de l’ordre pour rétablir l’ordre et la sécurité, le discours ferme et sans ambigüité des autorités à rétablir l’ordre et la sécurité et à ne pas tolérer des zones de non-droit à l’intérieur du pays ou dans la capitale…, comme des « appels à la violence ethnique » et même pour certains « un début de génocide » ?
Pourtant, tout gouvernement responsable confronté aux tels événements lancerait un tel message. Comment le président Obama peut-il continuer à se baser sur une manœuvre de désinformation de l’opinion internationale alors que les services de son ambassade à Bujumbura sont parfaitement au courant de la réalité et savent que les propos des responsables burundais avaient été intentionnellement mal interprétés ? De là à conclure que l’Ambassade des USA à Bujumbura est complice des chefs de l’insurrection qui donnent des ordres et fournissent la logistique pour semer l’insécurité dans le pays, il n’y a qu’un pas que les esprits de bonne foi n’hésiteront pas à faire.

3. Contrairement aux dispositions de la résolution du Conseil de Sécurité des Nations Unies qui appellent au dialogue national « au Burundi et à l’extérieur », Barack Obama décrète que les négociations devront se faire « en dehors du Burundi ». On dirait que son speech lui a été inspiré par ceux-là même qui dirigent l’insurrection à partir de l’étranger et qui sont déjà inculpés pour des actes terroristes et autres crimes contre l’humanité et qui redoutent de devoir un jour en répondre devant la justice.

4. Autre fait troublant : le président Obama s’adresse aussi à l’Armée burundaise comme pour lui dire de se rebeller contre l’autorité politique, chose incompréhensible et même impensable dans des pays dits démocratiques. Il a, à ce propos, fait miroiter le fait que l’armée burundaise participe aux missions de maintien de la paix de l’ONU dont on sait qu’elles sont en grande partie financées par les USA, comme pour dire que si elle parvenait à renverser les institutions démocratiques, elle recevrait toujours l’appui des USA. Les choses sont donc très claires et il ne pouvait pas être aussi précis pour faire comprendre qu’il travaille à la chute du régime actuel.

Innocent TWAGIRAMUNGU