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Source: Deo-Hakizimana-

Je reviens au titre d’arib.info du 3 février : Le putschiste Busokoza, a-t-il voulu récidiver ? Mais je vous laisse lire son contenu, si vous en avez le temps. http://www.arib.info/index.php?option=com_content&task=view&id=8564&Itemid=1. Moi, je poursuis avec un témoignage de ce que j’ai vu ou entendu… Durant les derniers mois de l’année 1995, l’actualité internationale circulant sur le Burundi, c’était aussi la publication du rapport du 5 juillet par 6 organisations de défense des droits de l’homme qui s’indignaient de la catastrophe du 21 octobre 1993 (assassinat du Président Ndadaye), qui provoque la radicalisation au Rwanda à la veille du 6 avril 1994.

Ces ONGs avaient l’autorité de parler et elles l’ont fait. Human Rights Watch (New York-Washington), LDGL (Ligue des droits de l’homme dans la région des Grands Lacs, Kigali), FIDH (Fédération internationale des droits de l’homme, Paris), OMCT (Organisation Mondiale contre la torture, Genève), Novib (Amsterdam), CNCD (Centre national pour la coopération au développement Bruxelles) et son pendant flamand, le NCOS (Nationaal centrum voor Ontwikkelingssamenwerking) ont tout vu, tout compris et tout dit, en quelque sorte, au lendemain d’une enquête de terrain diligentée au Burundi quelques mois après le putsch d’octobre 1993.

Ils ont par la suite publié un rapport le 5 juillet 1995, simultanément dans chacune des capitales citées plus haut.

Comme je venais de prendre mes fonctions à notre ambassade de Bruxelles, cette publication m’intéressait avec d’autant plus de vigueur que j’avais contribué, par mes idées et mes contacts, à la préparation ainsi qu’à la réalisation sur le terrain de cette enquête.

La vérité victime de la peur

Dans le cadre des visites de courtoisie que je rendais à mes amis ou aux hommes clés de la capitale européenne, je me suis entretenu avec une vieille connaissance, qui était surtout un éminent membre du Groupe des enquêteurs internationaux qui venaient de publier le rapport dont je parle. J’ai demandé à mon ami pourquoi les enquêteurs avaient tenu à citer nommément tous les plus grands présumés responsables du putsch du 21 octobre 1993, mais en omettant de mentionner le présumé responsable Numéro un. J’ai nommé le Major Pierre Buyoya. J’en parle plus ouvertement dans ma déclaration aux Nations Unies à Genève le 16 juin 2011, à la session du Conseil des Droits de l’Homme. Le document est immortalise sur youtube.com : http://www.youtube.com/watch?v=zkTghLRuWC0.

Mon ami m’a répondu, avec beaucoup de spontanéité très académique en me déclarant : «Nous avons eu peur ».

Auparavant, un autre ami, qui avait lui aussi pris part à l’enquête et à la rédaction du rapport final m’avait expliqué pourquoi les avaient dû se contenter seulement de publier le rapport sans pouvoir aller plus loin plus tard. Ils avaient dû voir en avant première les plus hautes autorités burundaises à qui le résultat de l’enquête avait été soumis,

Votre Président, me disait-il (nous sommes au premier semestre 1995 !) nous a fait comprendre que les conclusions de ce rapport n’engageaient que nous-mêmes, nous les auteurs, en sous-entendant qu’il ne serait pas suivi d’effet de la part du Chef de l’Etat. Plus tard encore, je suis allé poser la question au chef de ce qui était encore le Centre des Droits de l’homme devenu l’actuel Haut Commissariat des Nations Unies après le sommet mondial de Vienne. Ce haut responsable onusien m’a lui aussi dit : nous, en tant que Nations Unies, nous ne pouvons rien faire tant que les autorités gouvernementales du pays concerné ne nous demandent rien.

D’où le silence de plomb que l’on a vu, jusqu’au jour ou des pays comme le Canada décident quand même de réagir à leur manière. Ottawa a refusé le visa à l’ex-Major Président, malgré la protection dont il jouit dans certaines organisations multilatérales, par exemple à Paris ou à Addis-Abeba. [[Je veux parler notamment de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) auprès de laquelle il briguerait d’ailleurs le poste de Secrétaire général en remplacement d’Abdou Diouf. J’apprends que le hasard a voulu que le Major soit en ce moment à Bujumbura. Certains croient savoir que ce serait lui qui aurait convaincu Niyoyankana à renoncer aux promesses du CNDD-FDD. D’autres encore estiment que ce séjour n’est pas gratuit. Il signifierait que l’homme voudrait suivre les événements de plus prêt pour jouer un rôle, le cas échéant. Moi je prends cette information au sérieux. ]]

Faites maintenant un tour d’horizon dans certaines organisations multilatérales et comptez le nombre de Buyoyistes notoires qui s’y trouvent… Vous me direz.

Je reviens maintenant à Busokoza

Acceptez de lire avec moi le 3ème paragraphe de la page 25 du rapport (édition initiale), qui répertorie les noms de 14 officiers de l’Armée burundaise soupçonnés d’avoir participé au complot du 21 octobre 1993. Après les noms de Simbanduku, Ningaba et Nzosaba, tous lieutenant colonels à l’époque, viennent les Majors Ndayisaba, Nibizi, Bugegene, Ndacasaba, Niyoyunguruza, Rumbete et une certain Busokoza, tous Majors à l’époque des faits. Suivent les lieutenants Ntarataza, Kamana et Ngomirakiza.

A la page 27 du même rapport, on retrouve la liste des 4 civils de la Direction nationale de l’Uprona qui ont été consultés et qui sont connus dans la crise que nous traversons après le 21 octobre 1993.

Parmi eux des hommes de la vieille garde : Charles Mukasi, Libère Bararunyeretse, Jean Baptiste Manwangari et Alphonse Kadege. Faites alors vos analyses, vos rapprochements par rapport aux événements actuels et passés, et vous verrez que ceci explique cela.

Le réquisitoire du Procureur général s’exprimant dans le cadre du procès aujourd’hui en souffrance à la Cour Suprême et différents documents exclusifs accompagnant ce réquisitoire en disent encore plus.

BIRACAZA (A suivre).