Briefing du Conseil de Sécurité sur la situation au Burundi : discours de l’Ambassadeur NSHINGIRO Albert
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Madame la Présidente,
•Je souhaite dès l’entame de mon propos vous féliciter ainsi que votre pays la Pologne pour l’accession à la présidence tournante de ce Conseil pour le mois de mai. Vous pouvez tout naturellement compter sur le plein soutien et l’entière coopération de ma délégation pour le reste de votre mandat.
•Permettez-moi également de remercier à travers vous Madame la Présidente, les autres membres du Conseil qui ont toujours soutenu le respect des principes et valeurs de la charte des Nations Unies dans le traitement de la situation au Burundi par ce Conseil, pendant que certaines délégations restent emprisonnées et embrigadés dans la rhétorique de 2015 sans évoluer parallèlement à l’évolution positive de la situation du terrain.
•Qu’il me soit permis aussi de remercier l’Ambassadeur Jurg Lauber, Président de la configuration-Burundi de la Commission de consolidation de la paix pour son rôle positif et de plus en plus grandissant dans le processus de consolidation de la paix au Burundi.
•Je ne peux pas ne pas remercier l’Envoyé spécial du Secrétaire Général, Monsieur Michel Kafando pour son briefing qu’il a bien voulu partager avec ce conseil.
•L’objet de mon intervention consiste à partager avec ce conseil les derniers développements au Burundi depuis le dernier briefing du Conseil sur la situation au Burundi il y a 3 mois dans cette même salle.
•Sur le plan politique, le Burundi vient de clôturer avec succès retentissant le référendum constitutionnel qui a eu lieu le 17 mai 2018. Selon les résultats provisoires au niveau national proclamés le lundi 21 mai 2018 par la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI), le oui à la nouvelle constitution du Burundi a largement gagné avec 73,26% avec un taux participation record de 96,24%. Par ce scrutin, le peuple Burundais vient de prouver à la communauté internationale sa maturité politique et ses capacités d’organiser des élections démocratiques, libres, transparentes et apaisées avec un budget 100% national.
•Le référendum du 17 mai 2018 et la campagne de deux semaines qui l’a précédé se sont déroulés dans de très bonnes conditions dans tout le pays et au sein de la diaspora. Aucun incident majeur n’a été rapporté à la CENI durant tout le processus jusqu’au jour J. La campagne a été très animée, plurielle, multicolore et inclusive. Au total, outre le parti au pouvoir, 25 partis politiques et coalitions de l’opposition ont participé à la campagne électorale qui s’est déroulée paisiblement dans le tout le pays avec un sens élevé de tolérance politique entre les partisans du oui et du non à la révision constitutionnelle.
•Madame la Présidente, en votant à 73,26% en faveur de la nouvelle constitution avec un taux record de participation de 96,24%, le peuple Burundais vient de réaffirmer sa souveraineté, son Unité dans la diversité, sa cohésion sociale, sa tolérance politique, son patriotisme, sa bravoure ainsi que sa volonté de s’approprier définitivement de la gouvernance politique, économique et culturelle du Burundi. Le 17 mai 2018 restera un jour inoubliable qui sera toujours gravé en lettres d’or dans l’histoire politique du Burundi.
•Ma délégation rappelle au passage que la réforme constitutionnelle qui vient de s’achever avec succès est le résultat de larges consultations menées durant plus d’une année auprès de la population burundaise dans toute sa diversité. Il s’agit d’un exercice qui vise la stabilité à long terme du pays notamment par la sortie de la période transitoire sous la Constitution de 2005.
•Au niveau substantiel, la nouvelle constitution respecte pleinement l’accord d’Arusha de 2000 auquel le Gouvernement du Burundi attache une grande importance. Tous les articles substantiels de l’accord d’Arusha garantissant les principes démocratiques, la souveraineté, la cohésion sociale, la stabilité politique, l’unité nationale, la justice sociale, la protection des minorités, les quotas ethniques et de genre dans les institutions, la limitation des mandats et la protection des droits de l’homme ont été maintenus ou renforcés. Ce qui se dit sur un soi-disant non-respect de l’accord d’Arusha relève de la manipulation de l’opinion et de la volonté de certains acteurs exogènes à vouloir déstabiliser le Burundi. Ce comportement qui s’est manifesté depuis 2015 n’est pas mort et enterré. Nous en sommes très conscients ! Le peuple reste très vigilant pour sauvegarder son unité et sa cohésion. Le degré du patriotisme qui s’est développé depuis 2015 chez les Burundais ne laissera aucune fissure à aucune tentative de déstabilisation du pays à partir de l’étranger.
•Madame la présidente, jusqu’à présent, un seul acteur politique, chef d’une coalition des indépendants dénommée Amizero y’abarundi sur les 26 partis ayant participé au scrutin, a contesté, sans convaincre, l’issue des élections référendaires du 17 mai 2018. Cela a été fait avant même que les résultats officiels provisoires ne soient proclamés par l’organe compétent qui est le Commission Electorale Nationale Indépendante. Il convient de rappeler que cet acteur politique n’a jamais reconnu aucun résultat électoral depuis qu’il est en politique. Il s’agit d’une récidive dans la négation des résultats de toutes les élections auxquelles il a participé. Au cas où cet acteur récidiviste ne retirerait pas sa contestation sans fondement, la sagesse et l’état de droit l’obligent de se conformer au code électoral en saisissant les mécanismes juridiques compétents pour gérer les litiges électoraux.
•Je dois dire que les délégations qui lancent des flèches à notre référendum sont ceux-là même qui avaient projeté des scénarii alarmistes avant la tenue de ce référendum qui vient de se clôturer avec un succès éclatant et inattendu pour elles. A ces délégations, la réponse est simple : le référendum du 17 mai 2018 est victime de son succès.
•Pour ce qui est de la couverture médiatique du référendum du 17 mai 2018, ma délégation salue le travail remarquable de la synergie des médias publics et privés. En effet, dès l’ouverture des bureaux de vote, 15 radios publiques et privées ont assuré en direct la couverture du scrutin en temps réel dans les quatre langues les plus parlées au Burundi. Cette présence médiatique permanente a renforcé le degré de transparence du Scrutin en plus de la forte présence des mandataires politiques de chaque parti et coalition politique dans tous les bureaux de vote, dotés du droit de contresigner les procès-verbaux des opérations de vote après dépouillement.
•Parlant des médias, il ne serait pas superflu de rappeler que le Burundi a été récemment injustement et prématurément condamné par certains de ses partenaires pour avoir pris une mesure de suspension temporaire de deux émissions de BBC et de VOA pour cause de violation flagrante des règles de déontologie journalistique. Au terne d’une rigoureuse investigation, BBC World service, dans sa lettre du 11 mai 2018 adressée au Président du Conseil National de la Communication du Burundi, a reconnu que les journalistes impliqués dans l’organisation et la conduite de l’émission « invité de la semaine » avec un invité proche de l’opposition radicale burundaise, ont agi en violation de la déontologie professionnelle et des règles rigoureuses en vigueur au sein de BBC.
•Après la reconnaissance des faits, la direction de la BBC a alors présenté ses excuses officielles au Conseil national de la Communication dans sa lettre du 11 mai 2018. Par la même lettre, BBC s’est engagée de ne ménager aucun effort afin que de tels manquements à la déontologie du métier de journaliste ne se reproduisent plus dans l’avenir. Le Conseil national de la communication (CNC) du Burundi a bien accueilli les excuses de la BBC et attend la suite à donner au droit de réponse que cette radio a promis au Gouvernement du Burundi pour clôturer rapidement cette question dans un esprit constructif. Ma délégation encourage la voix d’Amérique qui a reconnu dans sa lettre du 18 mai 2018 d’avoir diffusé une information déséquilibrée sur le Burundi à faire de même.
•En ce qui concerne le dialogue comme moyen de résolution pacifique des différends politiques et de consolidation de la paix, le Burundi réitère son engament à consolider la paix, l’unité, la stabilité, la cohésion sociale, la concorde nationale, l’état de droit ainsi que l’ordre démocratique en cours à travers un dialogue permanent.
•En ce qui concerne la situation sécuritaire, le Burundi reste très engagé sur la voie de la paix, de la stabilité et de la réconciliation nationale. La situation sécuritaire est globalement bonne sur tout le territoire burundais. En témoigne l’organisation avec succès d’un référendum constitutionnel libre, transparent, démocratique et apaisé ainsi que l’organisation, du 22 au 23 mai de la 72ème session du Comité Exécutif de l’Union Parlementaire Africaine (UPA). Au terme de sa session, l’UPA s’est réjouie de l’évolution positive de la situation politique, sécuritaire et sociale au Burundi. Elle estime que cette normalisation de la situation générale dans le pays devrait pousser l’UE à normaliser ses relations avec le Burundi en levant les sanctions économiques qui mettent en difficultés, de façon injuste, le peuple Burundais. L’UPA a aussi regretté la mauvaise compréhension et appréciation de la situation politique, sociale et sécuritaire au Burundi suite à des campagnes de désinformation qui inondent la communauté internationale. Lors de sa déclaration à la presse, le président de l’UPA a dit entre autres et je cite en substance « Ce que se dit sur le Burundi et ce qu’on voit sur le terrain est différent. Nous avons trouvé un Burundi viable, paisible, un pays qui a besoin d’être appuyé dans ses efforts de réconciliation et de développement »
•Pour ce qui est de la coopération bilatérale, le Burundi renouvelle son engament à renforcer ses relations d’amitiés et de coopération mutuellement bénéfiques avec ses partenaires aussi bien traditionnels et non traditionnels dans un esprit constructif et de respect mutuel. Ensemble, nous devons fermer la page 2015 et nous projeter vers l’avenir du Burundi, un Burundi tel que nous le voulons, un Burundi paisible, stable, prospère et vivant en harmonie avec ses voisins et les autres nations du monde.
•En matière des droits de l’homme, le Burundi poursuit ses efforts en vue de la promotion et la protection des droits de l’homme aussi bien au point de vue normatif qu’institutionnel. Nous réaffirmons notre entière coopération avec la communauté internationale dans la protection et promotion des droits de l’homme suivant les règles de jeu tracées par la Charte des Nations Unies.
•En ce qui concerne le retour des réfugiés, le mouvement de rapatriement volontaire qui a commencé en 2016 se poursuit à un rythme satisfaisant avec l’arrivée de plusieurs milliers de citoyens qui s’étaient réfugiés en Tanzanie notamment. Depuis 2016 à la date d’aujourd’hui plus de 000 Burundais sont déjà de retour au pays sur une base volontaire. Et pour 2018, le Burundi attend 72.000 rapatriés en provenance de Tanzanie principalement pour la période allant jusqu’au 31 décembre 2018.
•Dans le domaine de l’humanitaire, le Burundi souhaite que tout appui de la part de la communauté internationale soit orienté principalement aux efforts de développement en cours dans le pays. L’aide humanitaire devrait se limiter uniquement aux personnes se trouvant en situation d’urgence.
•Madame la présidente, je ne saurais terminer mon propos sans réitérer notre demande pressante de retirer le Burundi de l’agenda du Conseil de Sécurité. Il n’y a aucun critère objectif qui justifie le maintien du Burundi sur l’agenda de ce conseil conformément aux prescrits de la Charte des Nations Unies. Nous ne demandons pas un traitement de faveur, nous demandons que le Burundi soit traité équitablement comme les Etats membres conformément à la Charte des Nations Unies.
•La situation qui prévaut au Burundi est loin de constituer une menace à la paix et à la sécurité internationale, mission principale du Conseil de Sécurité. Au contraire, le Burundi participe activement et brillamment aux missions de maintien de la paix dans le monde avec plus de 6 mille hommes et femmes déployés principalement en Somalie et en Centrafrique. Notre participation aux missions de paix est un retour d’ascenseur à la communauté internationale qui est restée aux côtés des Burundais durant les moments sombres de son histoire avant la renaissance de la démocratie en 2005. Le temps et l’énergie alloués au Burundi devraient être orientés vers d’autres zones de conflits et tensions qui sont de plus en plus nombreuses. Je demande à ce prestigieux conseil de nous écouter et de prendre en considération notre appel, dans le cas contraire, l’histoire retiendra que le Burundi a été maintenu sur son agenda en dehors des critères établis par la Charte des Nations Unies et cela risque de créer un précédent dangereux.

Je vous remercie de votre aimable attention!

New York, 24 mai 2018