“Ceux qui ont organisé la conférence de Dar-es-Salaam étaient complices du complot contre l’avion de Habyarimana”
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A deux jours du 24ème anniversaire de l’assassinat du Président Cyprien Ntaryamira, le responsable chargé à l’époque de sa sécurité personnelle Deo Ngendahayo revient sur le complot dont a été victime son président.

Deo Ngendahayo: “Je ne crois pas qu’à l’armée il y eût un plan d’assassiner physiquement le Président Ntaryamira après la pathétique leçon du coup de force contre le Président Ndadaye”

« Ce qu’il faut savoir c’est que la présence du Président Ntaryamira dans l’avion de son homologue rwandais n’était pas prévue. La décision a été prise par les deux hommes 30 minutes avant le décollage », précise Deo Ngendahayo. « Aussitôt après la conférence de Dar-es-Salaam, poursuit-il, le Président Ntaryamira s’est levé et a introduit la demande auprès du Président Havyarimana, qui aussitôt l’acceptée, lui offrant trois places dans son Falcon 50 ».

M. Ngendahayo qui était de la délégation au Sommet de Dar-es-Salaam éclaire sur la raison de la demande : « Le Président Ntaryamira était venu dans un Beach Craft, un avion trop lent. La conférence avait débordé sur le temps prévu. » Et M. Ngendahayo de lâcher: « Ceux qui ont organisé cette conférence de Dar-es-Salam étaient complices du complot car cette conférence n’avait pas d’objet et ils ont tout fait pour l’étirer en longueur pour créer des conditions favorables à l’attentat! »

24 après la disparition de son Président, Deo Ngendahayo est toujours sous l’emprise du regret : « En tant que responsable de la sécurité du Président, j’aurais dû refuser que deux présidents montent dans le même avion, car les menaces étaient multipliées par deux. Malheureusement le Président nous a surpris et n’a concerté personne! »

« Le ministre Simbizi est malheureusement mort à ma place »

Revenant sur l’atmosphère politique et sécuritaire cinq mois après l’assassinat du premier président démocratiquement élu au Burundi Melchior Ndadaye suivi des massacres de 1993, l’ancien responsable de la sécurité de Cyprien Ntaryamira balaie les « rumeurs » d’une armée burundaise décidée ce jour-là du 6 avril 1994 à descendre le Beach Craft présidentiel de retour de Dar-es-Salaam. “Certes, l’opposition en voulait au Président Ntaryamira. Il avait été placé à la tête de la République après de dures négociations dont l’issue fut la session par le Frodebu, parti du président Ntaryamira de plusieurs des ‘acquis de juin’ issus de son écrasante victoire aux élections de 1993. Cyprien Ntaryamira était un président aux pouvoirs fortement diminués. Comme si cela ne suffisait pas, l’opposition voulait les restreindre encore davantage. La Cour Constitutionnelle avait rejeté sa légitimité à la présidence de la République. Mais c’était une opposition politique, je ne crois pas qu’à l’armée il y eût un plan d’assassiner physiquement le Président Ntaryamira après la pathétique leçon du coup de force contre le Président Ndadaye”.

Deo Ngendahayo a toujours la pensée pour le ministre Cyriaque Simbizi, mort avec le Président Ntaryamira: “En tant que responsable de la sécurité, je devais être dans le Falcon 50 avec mon Président. Au moment où je m’apprêtais à embarquer, le ministre Simbizi est venu me supplier de lui laisser ma place en tant que ministre de la Communication. J’ai accédé à sa requête. Malheureusement, il est mort à ma place”.

Signalons que jusqu’à présent un mystère subsiste quant à l’auteur de l’attentat contre l’avion du président Habyarimana, lequel a emporté aussi la vie du Président burundais Ntaryamira, de son ministre d’État Bernard Ciza et du ministre Cyriaque Simbizi.