Partage

Choisir Buyoya serait transformer l’OIF en maison de retraite pour présidents
Diplomatie Le Point, 27/06/2014

Organisation internationale de la francophonie : qui pour succéder à Abdou Diouf ?

Cinq mois avant le sommet de l’OIF à Dakar, aucun des candidats ne tient la corde pour l’instant. Et les scénarios ne manquent pas

Traditionnellement, c’est à un Africain que revient ce poste créé en 1997. Il est vrai que 54 des 77 États membres de la Francophonie appartiennent au continent africain. Le premier secrétaire général de l’OIF fut l’Égyptien et ancien secrétaire général de l’ONU Boutros Boutros-Ghali. Abdou Diouf (photo) lui a succédé en 2002.

Parmi les candidats, trois Africains

Actuellement, trois Africains de poids figurent parmi les candidats. L’un est l’ancien président du Burundi, Pierre Buyoya ; les deux autres, Henri Lopes et Jean-Claude de l’Estrac, sont à la fois écrivains et anciens ministres des Affaires étrangères de leurs pays respectifs, le Congo-Brazzaville et l’île Maurice. Henri Lopes est l’actuel ambassadeur du Congo à l’Unesco, et de L’Estrac, homme de presse de talent qui fut quatre fois ministre à Maurice, est l’actuel secrétaire général de la Commission de l’océan Indien. Son élection permettrait de faire la liaison entre l’Afrique et les États francophones d’Asie.

Il ne suffit pas d’être africain, encore faut-il avoir occupé un poste de premier plan pour donner plus de poids à la Francophonie. Car si celle-ci a pour mission première de défendre et de promouvoir la langue et la culture françaises – ce qu’elle semble parfois oublier -, le sommet de Hanoï, en 1997, lui a aussi confié une fonction politique. Un volet qu’Abdou Diouf, ancien chef d’État, a particulièrement développé, intervenant dans le règlement des crises africaines. Mais rechercher un ex-chef d’État à tout prix, c’est prendre le risque de transformer l’institution en maison de retraite dorée pour présidents qui ne veulent pas aller cultiver leurs roses.

De multiples conditions pour avoir ses chances

Sans compter qu’il ne suffit pas d’être un ancien chef d’État. Ainsi, Pierre Buyoya, l’ancien président du Burundi, pourrait l’emporter. Il a pourtant un immense handicap : s’il n’a pas démérité lorsqu’il était au pouvoir, Buyoya, ancien militaire, est arrivé au pouvoir à Bujumbura par un coup d’État. Voilà qui fait désordre pour un futur secrétaire général de la Francophonie. De même, si le nom de l’ex-président libanais Michel Slimane circule, il ne déclenche pas l’enthousiasme.

Être une femme pourrait-il être un avantage ? Jusqu’alors, on ne connaît qu’une seule candidate, l’ancienne gouverneur du Canada, d’origine haïtienne, Michaëlle Jean. Elle a le handicap de ne pas être présentée par son pays, le Canada, ni par le Québec, qui occupe un poste de membre à part entière au sein de la Francophonie. Elle devra donc convaincre des présidents de lui donner leur voix. À son crédit, elle est la seule à déclarer vouloir développer une “francophonie économique” à côté de la francophonie politique.

On parle de certains outsiders, tel l’ancien maire de Paris, Bertrand Delanoë, qui ne se dit pas intéressé, ce que disent tous ceux qui le sont. Mais on imagine difficilement qu’un Français puisse être élu à la tête de la Francophonie.

Dans l’immédiat, le choix du successeur d’Abdou Diouf relève donc du casse-tête. Du sommet de l’Union africaine qui se tient à Malabo (Guinée équatoriale) jusqu’à ce vendredi est supposé sortir le nom du candidat de l’Afrique. Rien n’est moins sûr. À moins qu’un nouveau venu ne vienne rallier les suffrages.

Par MIREILLE DUTEIL