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« Au Burundi, le négationisme consisterait à ne pas reconnaître le génocide d’avril 1972. Aujourd’hui, chacun doit se réjouir qu’un tel fléau ,n’est heureusement , plus envisageable ».

Avant l’avènement de la démocratie dans notre pays, le mois d’Avril a toujours été un cauchemar pour une frange de la population Burundaise qui, par l’évocation du génocide déclenché le 29 Avril 1972, s’est toujours sentie, à tort ou à raison, encore une fois en danger. C’est en effet durant ce mois , qu’on a régulièrement enregistré, le plus d’abandons scolaires et de fuites de Burundais vers les pays voisins; l’administration de l’époque n’étant pas en mesure de rassurer les « victimes » de ce sentiment d’insécurité.

Ansi, durant les années 70, 80 et même 90, chaque fois en avril, notre pays vivait au rythme des rumeurs persistantes, de nouvelles arrestations , d’un nouveau massacre de masse, dirigé contre cette frange bien ciblée de la population. Les tenants du génocide, dans l’armée, la gendamerie l’admmnistration….. de cette période, et dont certains sont encore là, trouvaient que ladite frange augmentait trop vite, dans les écoles, l’enseignement supérieur, administration, commerce….et qu’il fallait que 1972 soit périodiquement renouvelé.

Il semblerait que, feu Président BAGAZA et d’autres dirigeants de son équipe, se soient, à maintes reprises, opposés à cette idée de renouvellement de 1972, malgré de nombreuses pressions dans leur camp. Cependant, lui aussi, malgrè son charisme et sa volonté manifeste de privilégier le dévloppement économique, n’a pas pu inverser la tendance faisant que l’administation, les services de défense et de sécurité, sans oublier les finances et les affaires, soient l’apanage de la seule autre frange de la population.

Cela dit, au moment de la commémoration ce 29 avril 2017, du 45è anniversaire du génocide au Burundi, il faudra éviter toute globalisation, de nature à raviver les tensions. Chacun ayant souffert de ces erreurs étatiques du passé , il serait encore plus condamnable de les évoquer aujourd’hui, comme justicatif à un quelconque dérapage.

Revenant à ce mois d’avril qui nous a apporté bien de malheurs, il faut dire que les concepteurs du mouvement SINDUMUJA de 2015, n’ont pas été bien inspirés en déclenchant leur mouvement, précisément au mois d’avril. Les dérapages que leur mouvement a connu à NYAKABIGA, MUSAGA , MUTAKURA et ailleurs,…ont fait dire à certains observateurs, qu’il s’agissait d’autre chose, que d’une simple contestation de mandat.

L’autre erreur de ce mouvement , dont c’est aussi forcément l’anniversaire, est d’avoir lancé dans les médias, l’imminence d’un génocide; chose impensable dans le Burundi d’aujourd’hui ; cela peut même être assimilé à une sorte de provocation. Il y a eu certes des morts et assassinats forts regretables, et pour cela, l’impunité , d’où qu’elle vienne,doit être combattue. Mais, s’il s’agissait d’une stratégie de certains pour reprendre le pouvoir, en utilisant un terme si lourd de souvenirs, on peut parler de cynisme caractérisé.

Par ailleurs , il faut noter un contraste saisissant entre le zèle affiché aujourd’hui par certains activistes nationaux et onusiens des droits de l’homme , et leur silence s’agissant du génocide de 1972. Or, dans l’objectif de lutte contre l’impunité, la priorité nationale, est de faire reconnaître par les Nations Unies, les évenements de 1972, comme un génocide. Ceci permettrait par la suite, un meilleur environement de travail, pour ces commissions qui sont entrain d’être mises en place.

A mon avis, C’est aussi en ce mois d’avril symbolique, que les responsables SINDUMUJA, dans leur diversité, ne devraient plus rester campés dans leur position. S’ils veulent que leur combat ait encore un certain sens, ils doivent montrer que, eux aussi , soutiennent le projet de reconnaissance internationale du génocide de 1972 et dénoncent l’impunité dont ses auteurs ont jusqu’aujourd’hui bénéficié.

De son côté, le gouvenement doit rester vigilant, s’assurer qu’il n y ait pas de dérapages , empêcher aussi que des responsables, services et organisations dans le pays, puissent réitérer des actions ou discours vendicatifs et provocateurs.

Enfin, dans la foulée de la commémoration du génocide Rwandais, au moment où des puissances occidentales et les Nations Unies s’émeuvent et s’indignent, avec raison, de leur inaction au Rwanda, il serait cohérent que ces mêmes puissances et Nations, s’emeuvent aussi pour ce qui est arrivé au Burundi en 1972 et reconnaissent cet autre génocide.

Anatole BACANAMWO