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La proposition de résolution déposée par le Parlement francophone bruxellois sera votée aujourd’hui.

Charles, 72 ans, fait partie des milliers de métis issus de la colonisation belge au Congo. Né d’une mère congolaise et d’un père belge, il a été retiré très jeune de sa famille. Une blessure qui n’est pas prête de se refermer.

« Peu après ma naissance, nous avons déménagé au Rwanda, suite à la mutation de mon père, qui était agent sanitaire au service de l’État. Bravant les interdits et les préjugés, il m’a reconnu. Cet acte lui a valu son renvoi du fonctionnariat colonial belge. C’est au Rwanda que ma mère fut convoquée pour la première fois chez un administrateur territorial. Celui-ci décida de me retirer de ma mère sur décision de l’État colonial. Je n’avais que 6 ans. »

Le jeune Charles est alors placé en institution à Savé. Sa mère s’installe non loin de là pour tente de garder contact avec son fils. « C’était une espèce de caserne où on ne sortait presque jamais. Certains enfants recevaient des coups de fouet et étaient ligotés contre un mur. Heureusement pour moi, j’avais la chance de pouvoir être avec ma maman durant les vacances mais j’étais un cas rare », raconte l’homme, désormais actif au sein de l’association Métis de Belgique.

Quelques années plus tard, l’État organise l’envoi d’un grand nombre d’enfants métis en Belgique. « Je suis arrivé ici lorsque j’avais 12 ans. Malgré le fait que je dispose d’un acte de naissance signé par un officier de l’État civil belge, j’ai été mis sous tutelle sans aucun jugement. Nous étions alors placés en orphelinat ou en maison d’accueil. J’ai eu de la chance car j’ai été placé dans une famille extraordinaire mais ça n’a malheureusement pas été le cas pour tout le monde. Certains étaient exploités ou maltraités », se souvient Charles, qui vit désormais à Koekelberg.

Ce n’est finalement qu’à ses 18 ans que le jeune adulte obtient la nationalité belge. Il réussit néanmoins à rester en contact avec sa mère. « Je lui avais promis de revenir et je l’ai fait en 1977. Le fils aîné de ma famille d’accueil a même été lui rendre visite lorsqu’il est parti en mission au Rwanda. Et puis, il y a eu le génocide… »

C’est pour reconnaître cette ségrégation à l’encontre des métis sous l’administration coloniale du Congo belge ainsi que la politique d’adoptions forcées que le Parlement francophone bruxellois a déposé une proposition de résolution ce vendredi. Initié par Julie de Groote (cdH), ce texte devrait automatiquement être adopté puisque celui-ci fait l’objet d’un consensus politique.

Via cette proposition, la Cocof demande au gouvernement fédéral de prendre des mesures en vue de résoudre les problèmes administratifs que rencontrent les métis et leurs descendants mais aussi de faciliter les retrouvailles par une meilleure collaboration avec les ambassades belges présentes sur place.

Dans la foulée, le Parlement bruxellois francophone insiste également sur la simplification de la consultation des archives coloniales en Belgique par les métis belges, leurs descendants ainsi que par les habitants le Congo, le Rwanda et le Burundi.

SARAH NUYENS