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Le 1er vice-président Gaston Sindimwo dévoile des préalables au dialogue inter-burundais prévu débuter ce 16 février : la nomenclature des partis invités, l’exclusion des personnes en conflit avec la justice…. Il s’exprime aussi sur les relations avec l’ONU et l’UA à travers les personnalités de Jamal Benomar et Ibrahima Fall. Il minimise les effets du gel de la coopération avec l’UE sur l’état de la pauvreté du Burundi et balaie du revers de la main les « allégations » de persécutions à l’endroit des Tutsi ex-FAB dans l’armée. Pour le gouvernement, les personnes récemment extradées de la RD Congo sont des malfaiteurs.

Pouvons-nous être éclairés sur l’authenticité de la liste des invités au dialogue inter-burundais qui circule notamment sur les réseaux sociaux ?

Le gouvernement du Burundi a vu la liste des participants sur les réseaux sociaux comme les autres. Le gouvernement ignore si cette liste est vrai ou pas étant donné qu’il ne fait pas partie de l’équipe de facilitation.

Sur la liste, je n’ai vu que les partis politiques. L’équipe de la facilitation a outrepassé ses compétences en créant et en invitant des partis qui n’existent pas: CNDD-FDD/Frondeur, UPRONA pro- gouvernemental, UPRONA/Amizero. C’est aberrant.

En quoi consiste cette aberration ?

Cette invitation causera problème au début du dialogue. Il faut appeler les gens comme ils s’appellent. Si on veut résoudre un problème sur une crise quelconque, il faut partir de la problématique de la crise et ne pas ajouter d’autres problèmes. Aujourd’hui la médiation crée une autre face du problème burundais.

Est-ce que le dialogue est possible sans la société civile, les confessions religieuses et les médias qui ne sont pas invités à Arusha ?

Nous n’allons pas avoir des miracles à Arusha. C’est une rencontre seulement de politiciens et non des activistes de la société civile ou des médias et encore moins des hommes d’Églises.

Si jamais le gouvernement trouvait Arusha des personnes recherchées par la justice burundaise, quelle sera son comportement ?

Il faut attendre encore, le gouvernement aura son mot à dire au moment opportun. Nous ne pouvons pas prendre une position aujourd’hui car nous attendons encore l’authenticité de ces listes qui circulent. De toutes les façons, nous savons que l’équipe de facilitation a amorcé un dialogue inter-burundais pour les Burundais qui vivent à l’extérieur du pays et qui de surcroît n’ont pas de problèmes particuliers avec le gouvernement du Burundi. Les gens qui sont sous mandat d’arrêt ou qui doivent répondre devant la justice ne sont pas concernés par ces pourparlers. Jusqu’à présent, le gouvernement reste sur sa position jusqu’à nouvel ordre.

Finies les consultations. Sera-t-il question de traiter les problèmes de fond avec le nouveau round de dialogue ?

Pour le gouvernement du Burundi, le fond est que ces politiques acceptent de jouer la démocratie telle que définie par la loi. C’est amener ces politiciens à ne plus quitter les élections. L’autre fond du problème c’est amener ces politiciens en exil à rentrer au bercail pour préparer les élections et respecter le verdict des urnes indépendamment de leur score. Nous attendons du dialogue que le peuple burundais dans son unité croie dans la démocratie.

Le gouvernement burundais aurait-il fait des concessions sur la question de la formation d’un gouvernement d’union nationale ?

Le gouvernement a déjà signifié que nous n’aurons plus de gouvernement venu de l’extérieur. Dans le temps nous avons vu des gens qui créaient du chaos dans le but d’amener le gouvernement à s’asseoir à la table de négociation afin de se partager les postes de responsabilité. Nous devons bannir cela. Nous devons faire respecter la loi, surtout la Constitution du Burundi qui stipule bien comment un parti peut aller au gouvernement. Aujourd’hui le gouvernement du Burundi est constitutionnel, on ne peut pas aller à Arusha pour former un gouvernement inconstitutionnel.

Il y a des questions qui sont devenues caduques : questions de mandat et de sécurité. Il faut discuter aujourd’hui les questions de développement du pays car l’ordre est bien rétabli. Pour nous, il ne faut pas s’attarder sur ces spéculations inutiles qui risquent de nous amener dans des problématiques déjà dépassés.

En novembre 2016, le gouvernement du Burundi aurait aimé que Benomar soit remplacé. Quelle est la position actuelle du gouvernement face à cet Envoyé spécial du Secrétaire des Nations Unies au Burundi ?

La question de Benomar a été vidée, parce que le gouvernement du Burundi a récusé ce fonctionnaire onusienne. Aujourd’hui Benomar n’a rien à dire sur le Burundi.

Où est-ce qu’on en est aujourd’hui avec la commission chargé de l’amendement de la constitution ?

Nous sommes en phase de préparer tous les textes nécessaires pour la mise en place de cette équipe qui va analyser les clauses de la Constitution qui fera objet d’un changement quelconque. Nous avons jugé bon de mettre ensemble les acteurs politiques pour trouver solutions aux problématiques qui se sont posées en 2015.

La pauvreté sévit au Burundi. Est-ce que le gouvernement aurait tenté de rétablir la coopération avec les pays de l’Union Européenne qui ont fermé les robinets en vertu de l’article 96 de la convention de Cotonou qui conditionne leur aide notamment au respect des droits de l’homme ?

Ce que nous faisons aujourd’hui, c’est d’abord améliorer la situation sécuritaire du pays et faire respecter l’état de droit dans la mesure du possible. Mais il y a des gens qui croient encore que l’état de droit est celui d’une personne seulement. Il faut respecter aussi l’état de droit d’un pays.

Pour revenir à la question de départ, la pauvreté ne sévit pas seulement au Burundi. Elle est une réalité dans plusieurs pays de tous les continents. Elle est liée à la conjoncture internationale.

C’est au Burundi que la pauvreté frappe le plus. Le pays le plus pauvre du monde, selon la Banque Mondiale ….

Nous sommes en train de faire de notre mieux pour que la population burundaise travaille d’arrache-pied afin de venir à bout de cette pauvreté. Entre temps, nous appelons les burundais à la solidarité pour venir en aide aux plus démunis, parce que nous devons compter d’abord sur nos propres forces.

Revenons à la question de départ. L’Union Européenne veut des signes concrets notamment pour ce qui est du respect des droits de l’homme pour rouvrir le robinet de la coopération…

Nous demandons à la communauté internationale de juger les burundais de ce qu’ils font et non de ce qu’ils entendent de l’extérieur ou des détracteurs. Les questions d’état de droit au Burundi, ne sont que des prétextes. Le Burundi fait mieux que beaucoup de pays en matière de droits de l’homme. Mais, curieusement, la communauté internationale focalise son attention beaucoup plus sur le Burundi que sur ces autres pays.

Dernièrement, à Addis-Abeba, vous-avez rencontré le directeur Afrique à l’Union Européenne et le Secrétaire Général des Nations Unies…

Je portais un message concernant la situation sécuritaire qui prévalait en ce moment-là au Burundi. Nous les avons invités de venir visiter le pays afin qu’ils puissent être au courant de ce qui se passe au Burundi de leurs propres yeux.

Sur quels autres sujets ont porté vos entretiens ?

Nous avons demandé au Secrétaire Général des Nations Unies que Benomar soit remplacé. Avec le directeur Afrique à l’UE, nous avons demandé à ce que les européens desserrent leur étau sur le Burundi. Quand il y a grâce et que des prisonniers sont libérés, on dirait que l’UE ne voit pas cet effort. Nous l’avons signifié au directeur Afrique à l’UE. Nous lui avons demandé aussi d’inviter le Burundi dans les instances de l’UE comme le parlement européen ou belge pour avoir aussi l’éclairage du gouvernement burundais. Nous avons signifié au directeur Afrique à l’UE que ce continent héberge, finance et coordonne les activités des détracteurs du Burundi à partir de la Belgique

L’opposition en exil dit que ce qui s’est passé récemment au camp de Mukoni, est une chasse aux sorcières contre les militaires ex-Forces Armées Burundaises (FAB), pour ne pas dire contre des militaires Tutsi. Qu’en dites-vous ?

Ça c’est un raccourci. Indépendamment de l’ethnie, celui qui tentera de perturber l’ordre et la sécurité du pays, qui qu’il soit, sera châtié conformément à la loi. Ce qui s’est passé au camp Mukoni de la province Muyinga rappelle les attaques sur le camp Bataillon Para, le camp Ngagara et l’Iscam le 12 décembre 2015. Quand les politiciens excitent les gens pour aller attaquer des camps militaires ou tenter une rébellion, il faut avoir la force de le faire. Ceux qui ont attaqué le camp Mukoni sont des malfaiteurs avant d’être Tutsi, Hutu, Twa, Ganwa ou autre chose.

Les Burundais rapatriés dernièrement depuis l’Est de la RD Congo étaient-ils des rebelles ou des citoyens innocents ?

Je signale que ce ne sont pas seulement des Burundais. Il y a aussi des Rwandais. Tous étaient des malfaiteurs qui préparaient des attaques contre le Burundi. Il y a une coopération entre Burundi et la RDC qui a fait que ce pays arrête ces malfaiteurs sur leur sol. Nous avons ensuite demandé leur extradition au Burundi.

Où sont-ils aujourd’hui ?

Ils sont aujourd’hui gardés dans les cachots de la République du Burundi. Les enquêtes continuent pour en savoir davantage sur ce qu’ils voulaient faire de notre pays. Nous demandons à d’autres pays limitrophes, de pouvoir faire la même chose que la RDC.

by Philippe Ngendakumana