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Le nouveau secrétaire général du parti au pouvoir s’exprime sur les changements à la direction du parti ainsi que sur certaines questions du moment.

Evariste NdayishimiyeAvec le dernier congrès, plus de président du parti mais un secrétariat général chapeauté par le conseil des Sages. Pourquoi le Cndd-Fdd a jugé bon de revoir la structure du parti ?

Le Cndd-Fdd a toujours fait des réformes organisationnelles en son sein chaque fois qu’il y avait nécessité. Quand Radjabu était président, Manassé était le Secrétaire général. Après il y a eu Jérémie Ngendakumana et il y avait un SG. Avant, il n’y avait pas de conseil de sages (CS). Mais il s’est trouvé qu’il fallait mettre en place cet organe peut-être pour conseiller les organes qui dirigeaient le parti.

Aujourd’hui, si on a décidé de réformer encore une fois, c’est lié à la situation que le Cndd-Fdd traverse. Vous avez vu que ceux quiont voulu disloquer le parti beaucoup étaient des membres du CS. Les membres du parti devraient voir comment faire pour qu’il n’y ait plus de scission.

Mais le congrès de Gitega a profité de l’occasion pour confier le parti à un CS dominé par les anciens combattants…

Je ne peux pas dire que ce sont des anciens combattants mais plutôt ce sont des anciens du mouvement, des gens clairvoyants, des gens mûrs qui ont enraciné leur idéologie. Donc le CS est composé des membres du Cndd-Fdd qui ont une maturité, qui sont rodés en matière politique, qui maîtrisent la situation du pays.

Sinon, il n’y a pas de distinction entre les combattants et les non combattants. La population était avec le Cndd-Fdd. Si les civils ne prenaient pas les armes, ils contribuaient dans le renseignement et distribuaient des vivres aux combattants. Donc s’était tous des combattants parce que c’était tout un peuple qui résistait à l’armée gouvernementale.

Un congrès pour chasser Pascal Nyabenda pour être notamment un civil ?

Une mise au point : M. Nyabenda est combattant de première heure. Il est parti quand il y avait des problèmes au sein du mouvement Cndd-Fdd. Le mouvement a connu des difficultés. Il s’est installé à Nairobi. Quand Ndayikengurukiye a été limogé à la tête du Cndd-Fdd, à Nairobi, les autres l’ont suivi. C’est seul PascalNyabenda qui est resté fidèle à la lutte.

Pour revenir à la question, le congrès a estimé qu’il était difficile à Pascal Nyabenda, le numéro 2 du pays, de gérer le parti et ses hautes fonctions. On a jugé bon de le remplacer pour rendre le parti plus efficace.

Quelle stratégie de sortie de turbulence économique ?

Le Burundi est très riche. Nous avons des ressources naturelles très importantes : le nickel et l’or par exemple. L’environnement géographique est favorable. C’est un milieu où les touristes peuvent passer les vacances.L’environnement politico-sécuritaire est là. Il est temps qu’on exploite cela. Le capital se cherche. Il y a des investisseurs que nous devons chercher pour exploiter nos ressources.

Autre fait. La population était habituée à vivre sur l’ apport de l’Etat providentiel. Il faut quitter cet état de chose. Il faut amener la population à travailler.

Le pays manque de devises. Quelle est la stratégie du Cndd-Fdd pour renflouer les caisses de l’Etat ?

Les caisses de l’Etat ne sont pas vides. C’est vide par rapport aux grandes puissances ? Il faut vivre à la hauteur de ce que vous êtes. Le Burundi n’est pas les Etats Unis. Si les caisses des EU contiennent des milliards de dollars, le Burundi a ce qui suffit pour le Burundi. Le problème est qu’on veut imiter les autres. Nous devons savoir ce que nous sommes et vivre ce que nous sommes.

Si nous continuons à exploiter nos ressources, la richesse est entre nos mains. A court terme il faut s’auto-suffire. Et à long terme nous allons produire pour exporter.

L’opposition accuse le Cndd-Fdd de vouloir enterrer l’Accord d’Arusha notamment la disposition qui limite les mandats présidentiels à deux et cela par le truchement de la CNDI. Qu’en dites-vous ?

La commission nationale du dialogue inter-burundais a rassemblé les idées de la population burundaise. Le gouvernement a reçu le rapport. Jusqu’àprésent on ne sait pas encore ce que le gouvernement va faire sur base de ce rapport. Il reviendra au gouvernement de l’analyser. Et il n’y a pas à s’alerter aujourd’hui.

Quelles ont été vos fonctions au maquis ?

J’étais parmi, les hauts cadres depuis 1995. J’étais capitaine alors que les autres qui étaient venus de l’Université étaient encore sous-lieutenants. J’ai été à l’Etat-major général, commissaire politique auprès des forces combattantes, le porte-parole du haut commandement, commandant région au niveau de nos unités de combat. J’ai commandé trois régions. J’ai été commandant base intérieur quand les autres étaient au Congo. Quand on a limogé Ndayikengurukiye, je suis devenu comme président d’un bureau politique qui concevait et planifiait la politique de la lutte.

Vous avez démissionné de l’armée. Un mauvais calcul ?

Je disais à mes collègues que je ne pouvais servir l’Etat à plus de 55 ans, que j’allais quitter l’armée pour les affaires privées. Je voulais donner l’exemple. Si je reste aux fonctions du gouvernement, je risque de mourir pauvre alors que je peux travailler pour moi-même.

Le général Ndayishimiye est aussi connu sous le sobriquet de Never…

Ce n’est pas Never, jamais. Mais N comme Ndayishimiye et Eva comme Evariste. Souvent quand je suis pressé j’écris « N. Eva ». Il y a ceux qui pensent que je suis méchant, un homme dur, irréductible sur base de ce qu’ils appellent Never. Ils pensent à tort que je dis toujours jamais, jamais.

Quelles sont vos occupations après les heures de service ?

Je jouais au football avant de me casser une jambe. Aujourd’hui, je pratique la natation et la marche. Après le service, je m’occupe des affaires sociales.D’abord de la famille. Des fois, je prends la houe et je plante moi-même les légumes. J’ai un poulailler, une porcherie et j’élève des lapins.

Père de combien d’enfants ?

Je suis père de deux filles et trois garçons.

Quels sont vos mauvais souvenirs ?

La mauvaise cause qui a fait que je sois dans le maquis : Je n’ai jamais compris comment un homme d’Etat peut amener sa population à s’entretuer. Autre mauvais souvenir :les difficultés dans le maquis. Il y avait des assassinats entre amis. Je ne pensais pas que cela pouvait arriver. Mais j’ai vu que des intérêts individuels peuvent amener des gens à s’entretuer,même si vous êtes des amis.

Les bons souvenirs ?

Cette aventure qui m’a conduit au maquis. J’ai vu que tout est possible quand vous avez raison. A quelque chose malheur est bon. Ça m’a donné la chance de m’ouvrir de nouveaux horizons. J’ai eu beaucoup de contacts. J’étais le chef de la délégation pendant les négociations ; j’ai vécu l’expérience politique et j’ai eu l’expérience diplomatique parce qu’on travaillait avec la communauté internationale, tout cela ce sont de bons souvenirs qui m’aident à gérer ma vie au niveau de la société.

Iwacu 05/09/16