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Honorable Membre du Parlement européen,
Votre article paru dans Jeune Afrique du 27 janvier 2016 a attiré mon attention et m’a beaucoup interpellé.

En tant qu’élue européenne, ancienne Ministre d’un grand pays européen et très au courant des problèmes de la Région des Grands Lacs dont vous êtes originaire et des implications de certains milieux occidentaux dans la crise burundaise et les crises régionales ainsi que leurs conséquences négatives sur les vies des populations, leurs biens, l’environnement et la stabilité de la Région, accordez-moi l’honneur de vous demander de ne pas verser de l’huile sur le feu.
Permettez-moi de vous rappeler en guise de réponse trois points essentiels relatifs aux sujets que vous évoquez dans votre article.

1.Les pratiques religieuses du Président Pierre Nkurunziza

S.E. Mr le Président de la République Pierre Nkurunziza, comme tout autre citoyen burundais, a le droit de pratiquer sans se cacher la religion de son choix. Et comme il ne l’impose pas à ses concitoyens, qu’y a-t-il de gênant, scandaleux ou sujet à polémique pour vous ? Même s’il y en avait, pourquoi faites-vous du deux poids deux mesures puisque je ne vous ai jamais entendu commenter aussi négativement le Te Deum auquel le Roi Philippe de Belgique convie le Corps diplomatique à Bruxelles et qui fait l’objet de la Une des médias belges. Je ne vous ai jamais entendu désapprouver la participation publique des différents Chefs d’Etat musulmans au petit pèlerinage à La Mecque ‘Oumma’ qui passe à la une des médias de leurs pays respectifs et qu’on trouve sur leurs sites web gouvernementaux? Je ne vous ai jamais entendu réclamer, au nom de la laïcité, qu’on enlève ou qu’on cache les statues, crucifix et autres signes religieux chrétiens visibles des places publiques en Italie ou ailleurs en Europe pour ne pas frustrer ceux des autres confessions religieuses. Je n’ai vu nulle critique de votre part du fait que le Chef de l’Etat d’une des plus anciennes démocraties européennes, le Royaume- Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, Sa Majesté la Reine Elisabeth II, est aussi le Chef de l’Eglise anglicane. Et toutes ses activités de Chef de l’Eglise anglicane font la une des médias du pays. Cela relèverait-il d’un quelconque manque d’information ou de votre myopie sélective?

2.‘Dieu contre la MAPROBU ?’

Le refus catégorique de la MAPROBU par tous les élus burundais à tous les échelons et par une très grande majorité du Peuple burundais dans sa diversité plurielle ne relève aucunement d’une religion quelconque. S’il y en avait une, ce serait celle du patriotisme, celle de la défense de la souveraineté nationale.

3.‘Malheureusement Pierre Nkurunziza a pris l’habitude de fouler au pied la Constitution adoptée par référendum en 2005’.

Honorable Membre du Parlement européen, vos propos rappellent ceux d’un autre de vos collègues plus âgé et plus expérimenté que vous, qui se dit spécialiste du Burundi. Je vous rappelle que la légitimité et la légalité constitutionnelle de la candidature du Président Pierre Nkurunziza ont été validées par l’arrêt RCCB303 du 5 mai 2015 de la Cour constitutionnelle du Burundi, la seule légalement compétente pour interpréter notre Constitution. Elles ont été validées aussi par la décision de la Cour de Justice de l’East African Community en juillet 2015.

Voudriez-vous nous avouer les motivations qui vous poussent à vous arroger un droit et une compétence que ni la Constitution du Burundi, ni aucun autre instrument juridique européen ou international ne vous confèrent ?

Le Peuple burundais est suffisamment mûr pour savoir où se trouvent ses intérêts et ne recourt à ses amis qu’en cas de nécessité, et dans ce cas elle avise.
Je termine en vous demandant, Honorable Membre du Parlement européen et chère sœur africaine, d’arrêter de vous faire de la publicité sur les malheurs actuels du peuple burundais dont vous connaissez bien les origines et de ne pas contribuer à affecter négativement les relations du Burundi avec ses partenaires européens

Réponse à un article paru dans Jeune Afrique du 27 janvier 2016