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Réunis à Bruxelles ce 19 décembre 2015 pour analyser la situation socio-politique et sécuritaire du Burundi, le CISCAP porte à la connaissance de l’opinion nationale et internationale ce qui suit :
1. Du dialogue entre le Gouvernement Burundais et l’Union Européenne en date du 08 décembre 2015
Le CISCAP a suivi avec intérêt le début du dialogue entre le gouvernement burundais et l’Union Européenne tel que prescrit dans les clauses (Art.96) des Accords de Cotonou régissant le partenariat entre cette dernière et les Etats d’Afrique des Caraïbes et du Pacifique (ACP) dont le Burundi est membre. Malgré les interprétations des uns et des autres sur la nécessité d’un tel dialogue, le CISCAP salue la volonté du gouvernement burundais d’avoir répondu favorablement à l’invitation à ce dialogue. Non seulement un tel dialogue s’inscrit dans l’esprit des Accords de Cotonou, mais également, il nous renvoie aux relations historiques et d’amitié qui ont toujours existé entre le Burundi et les membres de cette Communauté. Toutefois, vu le climat de méfiance qui a précédé ce dialogue, et conscient qu’un dialogue est malgré tout un processus et non une fin en soi, le CISCAP reste prudent quant aux intentions de l’UE de faire aboutir ce dialogue. Cette inquiétude se justifie par deux raisons principales : d’après les participants à ce dialogue, les points de discussion avaient été modifiés à la dernière minute par la partie européenne et à l’insu des représentants du gouvernement burundais, rendant ainsi problématique le début de ce dialogue, la partie gouvernementale s’étant déjà munie des réponses (actions et échéances) concrètes aux premières attentes formulées par l’UE dans son invitation. La deuxième raison relève de la déclaration de l’UE sanctionnant la fin du premier round de ce dialogue. Le CISCAP juge cette déclaration de partiale avec un risque d’être instrumentalisée et de conduire à une intensification de la violence. Les Accords de Cotonou ayant évolué, allant du partenariat pour le développement à la sécurité, ne pas continuer à appuyer le Burundi dans ses programmes de développement mettrait en péril la stabilité et la paix dans ce pays qui sortait de plusieurs décennies de guerre civile. Il serait à cet effet mis à la merci des seigneurs de guerre. Le CISCAP, conscient de la culture de paix derrière la raison d’être de l’UE, espère par ailleurs que le prochain round de ce dialogue, que le Gouvernement Burundais souhaiterait accueillir à Bujumbura, aboutira à une solution de compromis pour barrer la route à cette triste éventualité.

2. Des attaques armées contre les institutions républicaines des Forces de Défense et de Sécurité dans la nuit du 11 au 12 décembre 2015.
Dans la nuit du 11 décembre 2015, le CISCAP a appris l’attaque armée contre les institutions républicaines de sécurité et de forces de défense du Burundi dans la capitale Bujumbura et aux environs, occasionnant des pertes importantes au sein des membres de ces institutions et dans les rangs des assaillants. Cette attaque a été spontanément condamnée par l’ensemble de la communauté internationale et restera gravée dans les mémoires des Burundais car elle leur rappelle le triste coup d’Etat avorté du 13 mai de cette même année contre les institutions démocratiquement élues. Cette attaque ciblée rappelle les attaques terroristes qui secouent d’autres pays du monde. La police et l’armée burundaises méritent d’être reconnues pour leur professionnalisme et leur unité dans la neutralisation des acteurs de cette attaque. Tout en rendant hommage aux victimes, le CISCAP salue également l’initiative de la justice, par le biais du Procureur Général de la République, de faire la lumière sur cette attaque et d’enquêter sur les allégations d’éventuels actes de représailles qui ont suivi cette attaque. Le comportement de certains politiciens et acteurs de la société civile, qui tentent de s’approprier certaines polémiques autour de cette attaque pour en faire un fonds de propagande visant à renverser les institutions en remettant en cause la capacité des Forces de Défense et de Sécurité burundaises à protéger la population, est d’ailleurs à regretter. L’appel à l’intervention des forces étrangères au Burundi par ceux-ci est un acte d’irresponsabilité. Le CISCAP s’aligne derrière ceux-là qui restent convaincus que le Burundi a des institutions sécuritaires capables de sécuriser la population sur toute l’étendue du territoire national. Leurs interventions dans les différentes missions pour ramener la paix et stabiliser d’autres pays en difficulté en est une preuve incontestable.
3. De la conférence de presse animée par le Belge Louis Michel, député européen et coprésident de l’assemblée parlementaire ACP-EU, et l’opposition burundaise radicale représentée par Maggy Barankitse à l’Université de Louvain-La-Neuve en date du 17 décembre 2015.
Le CISCAP considère qu’il est du droit de toute personne d’exprimer publiquement ses convictions dans la limite de ce que la loi autorise. Le CISCAP trouve donc l’exercice auquel se sont adonnés le député européen Louis Michel et l’opposante burundaise, Maggy Barankitse, légitime. Toutefois, les propos tenus par ces deux intervenants et plus particulièrement le Belge Louis Michel sont préoccupants. En s’arrogeant le droit de condamner ceux qui ont fait avorté le Coup d’Etat du 13 mai 2015 au Burundi, en appelant à continuer à chercher les voies et moyens pour renverser les institutions en place, en particulier l’actuel Président du Burundi ; en reconnaissant mobiliser les fonds nécessaires pour aider les opposants radicaux burundais ; en révélant au public qu’il est derrière les résolutions de l’UE et de l’Union Africaine visant à faire plier le régime de Pierre Nkurunziza ; en manipulant les concepts et l’Histoire pour faire croire à l’opinion qu’il existe un génocide en préparation au Burundi, les propos de monsieur Louis Michel qui abuse de son influence au sein de la communauté internationale sont non seulement inacceptables mais aussi ils violent la Résolution 2248 du Conseil de Sécurité des Nations Unies, qui « ….réaffirme son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance politique, à l’intégrité territoriale et à l’unité du Burundi …et qui condamne fermement toutes les déclarations publiques, provenant du pays ou de l’étranger, qui visent en apparence à inciter à la violence et à la haine contre certains groupes de la société burundaise ». A la lecture de cette résolution, monsieur Louis Michel devra assumer sa responsabilité devant l’Histoire. Il revient légitimement au gouvernement burundais d’agir en conséquence face à ces propos et à cette violation. Le peuple burundais a besoin de vivre en paix et non dans la guerre.
4. De la décision de la Conseil de Paix et de Sécurité (CPS) de l’Union Africaine (UA) sur un éventuel déploiement d’une Mission Africaine de Protection et de Prévention au Burundi (MAPROBU)

C’est avec surprise que le CISCAP a appris la décision du Conseil de Paix et de Sécurité (CPS) de l’Union Africaine (AU) autorisant l’envoi d’une force de 5000 hommes au Burundi. Cette décision est à mettre en parallèle avec la mauvaise lecture de la réalité socio-politique actuelle au Burundi. Les acteurs de cette décision ont été largement influencés par la médiatisation autour des mensonges de ceux qui ont des agendas cachés au Burundi, en l’occurrence la Belgique suivie par l’UE, grand bailleur du CPS, sans qui ce dernier n’existerait que sur papier. Le CPS est financé à hauteur de plus de 70% par l’UE, d’où sa survie budgétaire dépend naturellement du degré de responsabilité que celui-ci a envers cette institution extérieure. Le CISCAP ne peut, par conséquent, s’empêcher d’emboîter le pas d’autres observateurs qui affirment haut et fort que le CPS est une caisse de résonnance de l’UE. Les déclarations publiques du député européen Louis Michel en sont révélatrices. L’acceptation de cette force serait synonyme de l’acceptation de la remise en cause de la souveraineté du peuple burundais. La position du CISCAP est celle du gouvernement burundais, celle des pays amis du Burundi, et surtout celle du peuple burundais à travers ses représentants exprimée publiquement lors d’un débat parlementaire tenu ce 21 décembre 2015. Il n’y a pas de génocide en perspective au Burundi et il n’y en aura jamais. Le Burundi s’est doté des instruments politiques et juridiques fiables (les Accords d’Arusha, la Constitution burundaise, la Commission Nationale Vérité et Réconciliation, etc.) qui ne permettront plus un génocide dans ce pays, n’en déplaise à ceux qui exploitent médiatiquement ce concept pour atteindre leurs objectifs politiques. Dans l’esprit de solidarité entre les Etats de l’UA, le CPS devrait plutôt allouer les fonds destinés à cette mission au renforcement des capacités des Forces de Défense et de Sécurité burundaises dans leur combat quotidien contre le fléau du terrorisme qui endeuille actuellement l’Afrique et le Burundi en particulier. C’est ainsi que l’UA pourra prouver son indépendance et sa responsabilité pour la paix, la sécurité et le développement envers les peuples de ce continent.

Fait à Bruxelles, le 19 décembre 2015

Pour le CISCAP
Le Président: Dr. Innocent Bano
Le secrétaire exécutif: Florien Ntwari
Le porte-parole: Sandrine-Aimée Duvalier