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img-20150809-wa0068.jpgUne semaine, jour pour jour après l’assassinat ignoble du général Adolphe Nshimirimana au rond point de la gare du Nord à Kamenge. Ils étaient entre un millier et trois mille personnes, toutes vêtues de noir. Ils ont marché dans le silence de l’endroit où l’illustre disparu tenait un bistrot vers le lieu du crime. Un recueillement très remarquable, avec la participation des jeunes, des femmes et des personnes âgées. Sur le lieu du crime, des dépôts de fleurs et des bougies, mais aussi des larmes, des cris de détresse et de colère. On notait la présence des gens de tous âges, de toutes ethnies et de toutes catégories. A l’image de l’illustre disparu qui recevait tout le monde, petits et grands, hommes et femmes, Hutus comme Tutsis. C’était un rassembleur, un homme d’action.

adophenshimirimana-300x300.jpgIl ne le savait peut-être pas: mais Adolphe Nshimirimana était un héros national. Né et ayant grandi dans la misère à Kamenge, c’est à ce même quartier qu’il voue sa vie avant d’embrasser une aventure nationale à son retour d’exil au Rwanda et en RDC. Formé au maniement des armes en RDC, il fait partie des premiers combattants du peuple avec un certain Savimbi. Ils organisent la résistance armée contre les militaires qui venaient d’assassiner le président Melchior Ndadaye. Ils résistent aux bombardements impitoyables et aux carnages récurrents dans ce quartie: de 1994 à 1996. Les forces armées burundaises y subissent déjà des pertes énormes dont le colonel Kabwari, aux premières heures de la résistance armée.

img-20150809-wa0019.jpgLe général Adolphe Nshimirimana et ses compagnons décident de déplacer le théâtre des combats loin de Kamenge pour viser tout le territoire. Ils trouvent à l’Est de la RDC une zone sans contrôle étatique et y installent leur base arrière. Les Forces Armées Burundaises traversent la frontière et font la chasse aux rebelles. Mais entre temps, la rébellion se structure et dispose d’une branche politique et des soutiens dans différents pays, à l’exception des Occidentaux! Adolphe Nshimirimana, commandant en chef de la rébellion FDD inflige des pertes énormes aux forces gouvernementales. Le major Pierre Buyoya finit par accepter les négociations et l’accord global de cessee-le-feu. C’est son successeur Domitien Ndayizeye qui est chargé de tenir les Forces Armées Burundaises en respect lorsque le général Adolphe Nshimirimana et ses combattants font une entrée triomphale à Bujumbura. La guerre est terminée même si Agathon Rwasa poursuit les escarmouches et perturbe la sécurité. Le CNDD FDD fait intégrer un nombre important de ses combattants dans la Force de Défense Nationale et la Police Nationale. L’armée burundaise cesse d’être monoethnique. Elle est formée à 50% de Hutus et 50% de Tutsis. Pour la police nationale, on y reconnaît 60% de Hutus et 40% de Tutsis. Le peuple célèbre les retrouvailles de ses fils et filles. C’est le soulagement après dix années de guerre fratricide. A cause d’un groupe d’extrémistes qui ont horreur du verdict des urnes et des pêcheurs (européens) en eaux troubles.

Adolphe Nshimirimana devient le chef d’état major adjoint de la Force de Défense Nationale. Après les élections de 2005, il est nommé patron des renseignements. Un poste qu’il occupa pendant 10 ans et à son actif, il aura veillé à la sécurité du président élu. Ce qui permet au président Nkurunziza de terminer quasiment deux mandats. Une première dans les annales nationales. Il quitte le poste pour devenir un conseiller spécial chargé de missions à la présidence de la République. Il se fait plus discret mais demeure au four et moulin, au service de la République.

Même si ceux qui le détestent ont fait croire qu’il était un tueur froid, les témoignages des gens de toutes ethnies commencent à être rendus publics pour dire qu’il était plus un citoyen clairvoyant et méticuleux qu’un homme de terreur. Sa réputation de combattant habile et tenace en faisait un homme craint: un mythe vivant! C’était une fierté pour la population de Kamenge où il aimait passer le gros de son temps, un grand protecteur pour les natifs de Gitega car ses parents venaient de Gishubi (où il a appuyé la construction d’un stade et d’un village de la paix). Il appelait ses voisins de Gishubi ” Abumvakare” en référence au dynamisme de ses admirateurs au travail surtout d’intérêt communautaire.

Comme tout militaire qui se respecte, il aimait les femmes! Il aimait l’alcool et pour avoir vécu au Zaïre (RDC), il aimait la musique très dansante. Il n’avait pas de culture intellectuelle mais une intelligence innée, un grand sens d’analyse et beaucoup d’esprit d’écoute. Il savait anticiper, faire une appréciation des faits et des événements. Il était d’un calme olympien et d’une aura très forte. De nature simple, il avait un oeil aussi vif que qu’un aigle! C’est à cet homme venu de nulle part, à ce déshérité qui n’à jamais renié ses origines, qui forgeait admiration et respect que cette masse en deuil a rendu hommage à travers une marche incommensurable. Ce qui rappelle la détermination de ce peuple de Kamenge en 1993, bravant les fusils et baïonnettes des forces armées sous Jean Bikomagu et François Ngeze, pour marcher jusqu’au centre ville de Bujumbura réclamer la dépouille du président Melchior Ndadaye et des obsèques nationales.

img-20150809-wa0037.jpgPour l’hommage éternel au général Adolphe Nshimirimana, ce peuple réclame des obsèques nationales et un monument en son honneur. Car, après le génocide de 1972, jamais un en Hutu n’avait réussi les exploits de l’illustre disparu. Et ce n’est pas la réclamation de la population de Kamenge ou de Gishubi seulement. De toutes les contrées du Burundi, ceux qui reconnaissent l’exploit du CNDD FDD dans la restauration de la démocratie et de la dignité des déshérités des régimes fascistes font entendre leur voix: un mausolée s’il vous plaît en mémoire du “Lion de la forêt”! Oui, un grand homme est mort assassiné et c’est tragique. Mais une icône a vu le jour. Des livres vont lui être consacrés, comme il en fut pour Charles de Gaulle, Chaka, Hannibal ou Jules César. La marche de ce dimanche est aussi un avertissement aux fauteurs de troubles: la majorité silencieuse sait d’où elle vient. Elle sait se faire respecter et faire respecter ses choix, ses décisions. Il en est des résultats des élections de 2015. Ceux qui tentent de faire saigner les coeurs non encore guéris des épreuves des hécatombes de 1972 ou 1993, gare à vous et à vos parrains de l’Occident!
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